Je me suis beaucoup questionnée avant d’écrire ce texte, puisqu’étant propriétaire d’une boutique pour enfants, je fais habituellement éloge de la vie et de la jeunesse, mais bien inévitablement l’une ne peut exister sans l’autre.
Voilà, en l’espace d’un mois, j’ai perdu ma grand-mère et un de mes meilleurs amis. LA MORT : quel sujet abstrait à saveur irréelle avant d’y avoir été réellement confronté.
J’ai perdu mon père à l’aube de mon adolescence, j’y ai survécu. On survit toujours, même si ça nous paraît insurmontable, tragique, injuste… Les années amènent leur lot de délivrance et on se surprend même à se demander depuis combien d’années l’être cher nous a quittés. On n’oublie pas, jamais, mais le temps se charge de nous guérir du vide… enfin, jusqu’à la prochaine fois…
Après avoir vécu un tel drame j’ai ressenti un sentiment d’immunité face à la douleur de la perte, je me pensais outillée, blindée de l’armure de ma ténacité. Je me suis convaincue que les épreuves de la vie avaient forgé ma personnalité, mon endurance, ma résistance à la douleur, avais-je raison?
Aujourd’hui j’ai compris avec humilité que chaque deuil est différent et que chacun peut nous percer le cœur à sa façon! On ne peut s’exiger d’être fort devant la mort, nous savons tous qu’elle est inévitable, mais égoïstement, ne plus pouvoir prendre l’autre dans ses bras, l’entendre rire, partager, c’est si douloureux!
Ma grand-mère s’est éteinte à 10h hier, après quelques dernières années difficiles, maladies diverses, trous de mémoire, perte d’autonomie. Je me considère si choyée d’avoir pu passer ses dernières heures de lucidité en sa compagnie : à lui prendre la main, humecter ses lèvres, la changer de position. Elle a donné toute sa vie, c’était à mon tour de lui rendre un dernier hommage, aussi petit soit-il. Je pensais percevoir la mort de ma grand-mère comme une délivrance, une fin paisible pour un être qui a tant aimé. Oui, bien entendu, je suis soulagée qu’elle ne souffre plus, mais je ne ressens aucun sentiment d’apaisement. Je suis simplement envahie de cette tristesse accaparante qui lévite au dessus de ma tête. Je reconnais cette douleur et je sais qu’elle me quittera graduellement, mais aujourd’hui, là, maintenant, j’ai mal…
La mort de mon ami Martin est, pour sa part, arrivée si subitement que le choc a été proportionnel à la dévastation. S’ajoute à ça la liste des «pourquoi», si jeune, si aimant, si aimé! Cette disparition a fracassé toutes nos idées préconçues et ravagé nos certitudes! Comme quoi il est possible de mourir lorsqu’on est jeune et en santé, comme quoi la vie vient aussi chercher ceux qui donnent et répandent le bien, comme quoi il ne faut pas essayer de comprendre ou chercher une réponse.
Tout le monde le dit : voir la vie sereinement est même devenue une mode aujourd’hui. Qui suis-je pour vous dire de profiter de chaque instant comme si c‘était le dernier? Je ne suis rien d’autre que votre voisine, amie, sœur, amoureuse, connaissance qui se démène, comme vous, à garder le sourire, à rester positive, à donner de l’amour et du réconfort à ceux que j’aime et oui, à profiter de la vie! Je ne suis pas immunisée contre la douleur de la mort, je ne suis pas non plus un soleil qui brille incessamment, mais si j’ai compris une chose, bien malgré moi, c’est que j’ai la chance d’être en vie et que je me dois de l’honorer.
Comment gérez-vous le deuil d’un proche?