Cher enfant,
Ces quelques mots s’adressent à toi qui, depuis tes 18 mois, forge ton caractère de façon assez surprenante et intense. Assez en tout cas pour me déstabiliser, moi qui croyais te connaître sous toutes tes coutures et tes humeurs. C’est quand même moi qui t’ai fait, t’sais.
J’ai naïvement cru que les symptômes du terrible two qui t’envahissaient depuis quelques temps s’étaient dissipés, qu’ils s’étaient enfuis aussi rapidement qu’ils étaient arrivés. Erreur de débutante. Ils ne sont partis que deux semaines (des moments de bonheur!) pour revenir en force. Déchaînés, même.
Tu as maintenant tout près de 2 ans et demi et tu sembles bien décidé à vouloir mener le monde, à agir comme si tu étais déjà un adolescent. Avec une attitude parfois digne d’une brute, tu imposes ta loi dans la maison. Tu es pourtant si gentil et docile devant les autres. Que se passe-t-il pour qu’à la maison, tu changes à ce point?
Je manque de patience. Inutile de te le dire, tu le sais déjà. Je parle tout bas en serrant les dents, même que je sacre même parfois (OK, souvent, je l’avoue). D’autres fois, je suis découragée et, les yeux pleins d’eau, je me questionne sur la raison pour laquelle tu me fais ça et me demande pourquoi je réagis de la sorte. C’est moi l’adulte après tout.
C’est que, si tu peux être tellement gentil et souriant, tu peux aussi devenir un vrai petit diable de Tasmanie quand l’envie te prend! Je serais bien curieuse de savoir si c’est plus fort que toi ou si tu décides par toi-même de me rendre la vie plus difficile dans ces moments-là…
Tu sais, quand je te demande de venir me voir, quelle qu’en soit la raison, j’apprécie que tu t’avances vers moi en souriant au lieu de feindre l’ignorance en regardant un Lego de beaucoup trop près. Quand je t’annonce que c’est l’heure du bain, j’aime que tu m’accompagnes dans ta chambre pour te déshabiller, sans cris ni coups de pieds, sans finir par faire la run en poche à patates sur mon épaule. Quand je t’apprends que c’est le temps d’aller faire dodo, c’est tellement plaisant de te voir ramasser ton doudou et te mettre au lit sans chigner, au lieu de courir partout dans la maison en criant « NON! ».
Quand tu cries pour me faire comprendre que tu es exaspéré de mes refus, j’aimerais que tu baisses le ton pour écouter mon explication. Ça ne fait pas ton affaire, je sais, mais j’ai pas mal toujours une bonne raison de dire « non ». Quand tu te jettes par terre pour signifier ta frustration, si tu pouvais finalement comprendre que ça ne sert à rien de le faire, que ça ne changera pas la situation, peu importe la cuisson du bacon, ce serait bien. Quand tu m’ignores royalement alors que je compte jusqu’à trois pour que tu m’écoutes et que ça ne fonctionne pas, si tu savais comment je me sens décontenancée. Parce que, oui, tu sais que je vais sûrement compter une autre fois en espérant ne pas avoir à mettre mes menaces plates à exécution.
Ton caractère, tu ne l’as pas hérité du voisin, évidemment. Pourtant, ma propre mère m’a confirmé que je n’ai jamais agi de la sorte, enfant. Est-ce vrai? Est-ce qu’avec les années, on en vient à penser que cette phase n’était pas si pire? Est-ce qu’on finit par oublier?
Heureusement, durant ces moments, après avoir déversé toute ma frustration sur ton papa (pauvre lui), je me dis que, dans le fond, tu es un gentil petit garçon. Il y a des fois où je te souris et tu viens me faire un câlin. Je te parle et tu m’écoutes comme si j’étais la vérité incarnée. Je ris et tu ris avec moi, peu importe la raison (on est parfois juste trop fatigués de tes réveils en pleine nuit, je crois). Il y a d’autres fois où je ne fais rien de spécial et tu viens t’enrouler autour de moi et me serrer très fort.
Crédit : Julie Rochon
Il arrive que tu m’offres une soirée sans crises ni larmes, un repas sans hurlements, sans me lancer quelques chose par la tête. Un moment mère-fils à jouer aux Lego, à regarder des bonhommes collés. Une heure de coucher sans problème (rare dans les derniers temps). Un moment à te bercer, debout dans le noir, nos cœurs battant à l’unisson.
Que je sois au bord de la crise de nerfs ne veut plus rien dire dans ces moments-là. J’oublie tout et je suis la maman la plus heureuse du monde. Je suis heureuse d’être là pour toi. Et toi pour moi, je le sens. Et même si tu me vois et me sens souvent parfois à bout, dis-toi que je t’aime plus que tout au monde et que demain ira mieux. Promis.
Maman xxx
Et vous, qu’auriez-vous envie de dire à votre enfant alors qu’il n’est « pas du monde »?