Apprendre que son enfant est différent est un choc. C’est un long processus d’acceptation. Chaque fois que j’aborde ce sujet, les gens me demandent si c’est parce que j’avais des attentes face à mon enfant. Si je rêvais d’une petite patineuse artistique ou d’une gymnaste. Peut-être avais-je l’ambition qu’elle soit avocate ou chirurgienne? Avais-je honte d’elle? Est-ce que je l’aime moins parce qu’elle est différente des autres enfants de son âge?
Des questions sur le sujet, des accusations gratuites, j’en ai encaissées plusieurs. Les gens ne cessent pas de juger parce qu’il est question d’un enfant. Les gens prennent rarement le temps de s’informer si vous êtes fragile aujourd’hui. Si la semaine a été difficile ou si vous avez dormi dans les derniers jours. Ils vous lancent leur jugement et à vous de l’éviter ou de l’encaisser.
Pour bien des gens, il n’y avait pas de deuil à faire. Il n’y avait pas place à un processus. Ce devait être tout de suite l’acceptation. Si je ne l’acceptais pas comme elle est, c’est que j’étais trop conformiste. Je manquais d’ouverture. J’étais égoïste.
Il est si facile de juger ce que l’on ne connait pas. Si ces personnes avaient pris le temps de regarder ma vie en entier, plutôt que d’uniquement fixer les diagnostics de ma fille, ils auraient compris que sa différence a demandé de nombreux changements dans nos vies. Si la perte d’un emploi, un déménagement, la précarité financière, la perte d’amis, les conflits familiaux, les problèmes conjugaux sont tous des éléments qui a eux seuls poussent une personne vers un deuil, imaginez quand vous affrontez tout ça à la fois. Pas par choix! Pas parce que vous avez mal agi!
Tout ça vous tombe dessus en même temps parce que votre enfant est né malade ou handicapé! Oui, des conséquences il y en a et elles vont bien au-delà de l’acceptation de la différence de notre enfant. Ce n’est pas simplement mon cœur de mère qui en a pris plein la gueule. C’est ma vie au grand complet!
Mon enfant différent, je l’aime. Par contre, mon rôle de mère aussi est différent! Mon enfant devra affronter beaucoup plus d’embûches que les autres enfants et, oui, ce constat m’a fait pleurer longtemps. Mon enfant exigera que je me batte sans relâche pour faire valoir ses droits. Mon enfant qui parfois n’est pas assez ou trop handicapé pour être admissible a un programme ou a une activité. Mon enfant qui entend les autres parler d’elle sans comprendre pourquoi les gens disent certains mots, certaines choses. Mon enfant que je prends dans mes bras pour lui expliquer que les gens préfèrent parfois juger plutôt que de tenter de comprendre. Parce que c’est moins compliqué, parce qu’ils sont trop occupés, parce qu’ils sont pressés, que ça leur fait un sujet à jaser. Qu’ils préfèrent minimiser nos batailles parce que ça leur renvoie en pleine face qu’ils ont la chance de pouvoir juger, car ils ne savent pas de quoi ils parlent. Cet enfant qui ne comprend pas ce que je lui raconte, car pour elle, la nature humaine, c’est compliqué.
Son autisme ne lui permet pas de décoder ces gens qui sont indisposés par l’énergie de son T.D.A.H et agacés par ses lunettes fumées portées en public. Alors qu’ils jugent que mon enfant joue la star, qu’elle cherche l’attention, c’est une nécessité en raison de sa maladie génétique qu’est l’albinisme occulaire. Alors que les gens parlent, je me dois d’encaisser ma réalité et leurs jugements.
Au fil des années, j’ai fait le deuil de ma vie d’avant et de ma carrière. J’ai fait le deuil de mes projets qui ne verront jamais le jour. J’ai fait le deuil de certaines amitiés et de lien familiaux. J’ai aussi fait le deuil de l’approbation de ma vie dans le regard des autres et ça, c’est le plus beau cadeau que je me suis faite!
Parents d’enfants différents, comment avez-vous vécu l’acceptation de la différence de votre enfant?