À chaque hiver, j’ai cette envie qui revient m’obséder constamment, celle de vouloir aller me cacher dans une grotte pour hiberner jusqu’au printemps. Chaque année, en mars, je sens que je n’y arriverai pas, que c’est une évidence, qu’il faut repenser nos façons de faire, revoir notre style de vie, que notre système familial ne fonctionne pas. L’hiver, j’ai le blues.
Et depuis que je suis parent, ça ne s’améliore pas, même si je me plante deux heures chaque jour devant ma lampe de luminothérapie.
Toujours les mêmes pensées négatives refont surface. Que la conciliation famille-travail, ça n’existe pas. Qu’un de nous deux devrait laisser tomber sa job. Que c’est trop, que les matins m’épuisent. Juste ça, se dépêcher le matin, faire les lunchs, faire une pièce de théâtre pour habiller le petit dernier qui fait une crise. Courir. Arriver en retard à l’école, pis à la job. Se sentir coupable, encore évidemment. Repartir du travail presqu’aussitôt, pour aller chercher les enfants, sans avoir vraiment fini que ce j’avais à faire pour la journée. Prendre une autre journée de congé maladie. Voir ma liste de choses à faire s’allonger, au lieu de rapetisser.
L’hiver, c’est aussi chez nous un long rhume qui commence en novembre et qui dure jusqu’en avril. Je ne compte même plus les nombreuses visites chez le médecin, les antibiotiques, les pompes, les crèmes, les gouttes. On y passe un après l’autre… et ça recommence.
Le pire, c’est de devoir mettre l’habit de neige (souvent encore mouillé de la veille parce qu’on a encore oublié de le mettre dans la sécheuse) aux enfants le matin ET le soir. Ça a l’air de rien, mais ça demande le self-control d’un Jedi. Ensuite, il faut les attacher dans l’auto, les deux pieds dans l’sluch, les sacs à dos qui traînent dans les flaques d’eau brunes. Il faut pelleter, gratter le pare-brise (par dehors ET par en dedans), avec le petit qui crie comme un possédé en arrière, pour finalement rester prise dans un banc de neige avec la voiture et pogner une contravention pour ça.
Je suis brûlée. Les journées sont trop courtes. Il fait noir comme dans le cul d’un ours à 16 h, ça me déprime. Les fenêtres restent fermées, on étouffe en dedans, on gèle dehors dans cet hiver borderline montréalais. Il tombe encore de la neige, de la pluie, du verglas ou les trois en même temps?
Petite vie, petite misère comme on dit. Je le sais bien que rien de tout ça n’est tragique. J’entends déjà : « T’as choisi d’avoir trois enfants, de vivre à Montréal, et d’avoir une carrière en plus, eh bien vis avec, fille! ». Mais bon, ça m’a quand même fait du bien de sortir le méchant.
Merci de votre écoute.
OUF. Mais comme chaque année, nous sommes passés à travers, nous y sommes arrivés. Je le sais parce qu’enfin, je les ai sentis cette semaine, les premiers rayons de soleil, ce petit vent doux du printemps, les oiseaux qui se dégênent. Et doucement, la lumière qui revient. Je l’ai ressenti dans tout mon corps, du cuir chevelu jusqu’au bout des orteils, le printemps. On y est arrivé, on est passé à travers un autre hiver.
On a eu quelques beaux moments quand même (un peu de patin, de jeux d’hiver, de chocolats chauds, de séries Netfilx sous la couverte, de belles tempêtes où le temps a semblé s’arrêter quelquefois)… mais le printemps qui arrive, c‘est pour moi comme sortir d’une épuisante course contre la montre. J’angoisse l’hiver, encore plus depuis que je suis parent. Y’a comme quelque chose d’illogique dans tout ce bordel urbain de vie hivernale, ça ne devrait pas se passer comme ça. C’est une évidence, mais je continue de nager à contre-courant, un hiver à la fois.
Un jour, j’espère, je vais peut-être aimer à nouveau l’hiver. Un jour, quand mon bébé cessera de se sentir emprisonné dans son habit de neige ou sa camisole de force hivernale. Je ressortirai mes vieux skis (qui auront probablement séché au sous-sol depuis le temps, un grand classique parental) et mon vieux kit démodé des années 2000 qui fera honte aux enfants. Et je publierai un selfie de nous sur Facebook pour me convaincre que l’hiver, ce n’est pas si pire que ça au bout du compte.
Comment avez-vous survécu à l’hiver cette année? Quels sont vos beaux ou moins beaux moments?