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Vivre le décès d’un enfant, puis transmettre son histoire aux enfants qui suivent
Crédit: Kat S.

Lorsque ma fille est décédée subitement à l’âge de 2 ans et 7 mois, j’étais enceinte de plus de 38 semaines. Deux jours avant son décès, bébé 2 était bien descendu dans mon bassin, prêt à sortir. Bizarrement, quelques heures après son décès, il était remonté dans mon ventre et ne semblait plus vouloir sortir de sitôt. Selon mon médecin, mon corps comprenait probablement que ce moment de choc n’était pas propice à l’accouchement. Il avait mis ce projet sur pause afin d’assurer sa survie, un peu comme une femme des cavernes qui n’aurait pas eu avantage à accoucher en étant poursuivie par un mammouth!

Quoi qu’il en soit, à peine les funérailles terminées et l’adrénaline retombée, bébé 2 s’est pointé le bout du nez. Il n’a pas connu sa soeur, mais il a vécu le choc de son décès et l’intensité de ses funérailles dans mon ventre, puis notre deuil dans nos bras. Durant la première année de sa vie, je me suis contentée de vivre ma peine comme elle se présentait. Puis, devant notre fils qui grandissait, nous nous sommes questionnés sur la façon de vivre notre deuil. Devait-on en parler devant lui ou devait-on se faire discrets?

Je ne pouvais pas passer l’existence de notre fiille sous silence. J’aurais eu l’impression de la trahir et de la rejeter, ce qui était inconcevable. Sans la rendre omniprésente, je devais parler d’elle et continuer de la faire vivre à travers nos souvenirs. Même s’il était encore très petit, mon fils devait savoir qu’il avait une grande soeur et connaître son histoire. Je ne voulais absolument pas que ce soit tabou. Par ailleurs, je suis convaincue qu’il aurait ressenti notre peine à travers notre silence et que cela aurait pu être dommageable. Nous avons donc fait le choix d’en parler avec lui, en tentant de trouver les mots adaptés à un enfant de 2 ou 3 ans pour qui le concept de la mort est encore bien abstrait. 

La main de ma fille sur mon bébé-bedon, peu de temps avant son décès.
Crédit : Kat S

Nous lui disons que sa grande soeur a habité ici avant lui, mais qu’elle est décédée et qu’elle ne reviendra pas. Nous lui mentionnons que son corps n’est plus là, mais qu’elle restera toujours présente dans nos coeurs. Sans savoir si c’est la bonne chose à faire, nous ajoutons qu’elle est au ciel et qu’elle prend peut-être soin de nous de son nuage. Nous lui expliquons qu’elle avait une maladie grave que lui n’a pas, en prenant soin de ne pas lui créer de peurs. La dernière chose que nous souhaitons, c’est qu’il croit que nous pouvons mourir au moindre bobo! Nous évitons aussi d’utiliser des termes qui pourraient lui faire vivre de l’anxiété face au sommeil ou aux départs, comme « elle s’est endormie » ou « elle est partie ».

Nous regardons parfois des photos et des vidéos avec lui. Lorsque l’occasion se présente, nous lui partageons nos souvenirs et nos anecdotes. Il lui arrive aussi de me voir pleurer. Je lui explique alors simplement que sa soeur me manque et que c’est normal. Cette réponse semble le satisfaire. 

Depuis qu’il a environ 2 ans, il parle d’elle spontannément. Un soir, en rentrant à la maison, il a pointé la plus brillante étoile dans le ciel en disant : « Regarde maman, c’est Béatrice! ». Quelques mois plus tard, alors que je lui disais que son toutou avait appartenu à sa soeur et qu’elle était certainement très heureuse de le lui donner, il l’a remerciée en regardant le ciel. Souvent, il l’inclue lorsqu’il nomme les membres de sa famille. L’été, il prend plaisir à décorer son emplacement au cimetière avec nous et à participer au lâcher de ballons que nous organisons pour son anniversaire. D’une certaine façon, sa soeur semble faire partie de son histoire et cela me fait chaud au coeur.

Je ne sais pas si nous utilisons les bons mots, mais je sais que nous faisons de notre mieux. Je crois que nous utiliserons sensiblement la même méthode avec bébé 3 qui est né trois ans plus tard.

Parfois, je me demande comment les choses se seraient déroulées si mes fils avaient connu ma fille, si elle était décédée quelques années plus tard. Une partie de moi aurait tellement aimé qu’ils se connaissent, alors qu’une autre partie de moi est soulagée que mes garçons n’aient pas eu à vivre concrètement cette douloureuse perte.

Avez-vous eu à expliquer la mort d’un proche à vos enfants? Comment avez-vous fait?

 

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