Automne 1991. Petit Jean Philippe vient d’avoir 4 ans.
Au début de l’été, nous avions quitté mon patelin natal pour venir nous établir sur la Côte-Nord. Pas d’amis, sauf maman, avec qui je passe mes journées. Ma grande soeur, elle, va à l’école. Tous les soirs, elle me parle de son inscription au ballet.
J’ai toujours été quelqu’un d’influençable sur le plan de l’enthousiasme. Alors, je ne fais ni une, ni deux :
« Maman, moi aussi je veux le faire, le ballet. »
Ma mère me demande si je suis certain. Oh que oui! Je suis prêt. Chaussons achetés, collants noirs et t-shirt blanc. C’est officiel, je commence la semaine suivante.
Premier cours. J’arrive avec maman. Que des collants roses. Juste de filles. Elles sont belles avec leur chignon tressé et leur léotard. Mais moi, je suis tout seul de gars. Je regarde ma mère:
« Mais, j’suis le seul garçon? »
Ma mère n’avait pas cru bon me spécifier ce détail (je l’en remercie d’ailleurs avec du recul). Alors je me suis assis, j’ai regardé la première répète, et ce fut la fin de mon histoire au sein de l’École de ballet.
Les Grands Ballets Canadiens pleurent encore ma retraite précipitée!
L’histoire aurait pu se terminer comme ça. Sauf que plus tard, j’ai commencé à sortir avec une danseuse. T’sais une danseuse qui ne se déshabille pas. J’allais voir les spectacles, je trouvais ça ben bon pis ben beau.
Une année, sa mère est administratrice au conseil d’administration de l’école de danse. Et il se trouve qu’il manque de gars dans la troupe de spectacle cette année-là. Elle m’a pris par ce qu’elle savait être le plus efficace, l’estomac :
« Si tu n’essaies pas la troupe, je ne te fais plus jamais de couscous. »
Il faut avoir goûté une seule fois au couscous de ma belle-mère pour savoir qu’elle ne niaisait pas avec la puck… C’est donc comme ça, en 2004, que j’ai fait mes premiers pas dans l’Ensemble folklorique Tam ti Delam, probablement la troupe de danse la plus cool de l’histoire de l’humanité. Depuis 2008, je suis tellement passionné par ce loisir sport, que j’en suis devenu l’un des quatre chorégraphes, membre de la direction artistique.
Laissez-moi vous expliquer les raisons pour lesquelles je souhaiterais que mon garçon danse:
1. Le respect de l’autre / de la femme
Quand on fait partie d’une troupe de danse, on apprend à dealer avec l’autre. On danse rarement seul. Pis on danse souvent avec des femmes. Alors, comme gars danseur, on apprend à gérer le toucher respectueux, la bulle de l’autre. J’ai appris rapidement à ne pas voir le corps de l’autre comme un objet sexu, parce que entre autres, en show, quand c’est le moment d’un changement rapide de costume, des brassières pis des bobettes, il y en a!
2. Les saines habitudes de vie
Bouger, danser, c’est un exutoire, oui. Mais c’est aussi un excellent exercice physique où tous les groupes musculaires sont sollicités. À tous ceux qui ne pensent pas que la danse est un sport, je vous défie d’assister à une répète de trois heures de ma troupe de danse. La première année où j’ai dansé, j’ai perdu trente livres en 4 mois. Fin de mon argumentaire.
3. L’ouverture au mouvement et à la créativité
Le mouvement, c’est le reflet de la vie. La musique et la danse, ça rend heureux. Danser m’a appris à être plus confortable avec mon corps et le corps des autres. La plupart des ensembles de danse proposent aussi des ateliers de création. Pis ça, la créativité, ben on en a toujours besoin.
4. Le sentiment d’appartenance
Appartenir à un groupe de danse, c’est se créer une famille tissée bien serrée. Tous unis par un désir bien défini, les gens que vous croiserez dans les activités de danse sont, pour la plupart des gens ben ben funny pis super agréables à côtoyer.
Comment vous et votre conjoint/conjointe réagiriez si votre garçon vous demandait de danser?