Après une césarienne où j’ai été simplement figurante, A, B et C ont été placées immédiatement en incubateur : deux ont été intubées et une a été placée sur infant flow. Je n’ai pas vu les bébés sortir. J’ai seulement entendu bébé 1, 12 h 04; bébé 2, 12 h 06; bébé 3, 12 h 06. J’ai été placée en salle de réveil pendant un certain temps. Je ne me rappelle plus pour combien d’heures ou de minutes, mais je me rappelle que je voulais me lever. Je voulais aller voir celles que j’avais portées, celles que je n’avais pu garder plus de 29 semaines et cinq jours dans mon ventre.
Mon conjoint faisait la navette entre la néonatalogie et la salle de réveil. Les infirmières que j’avais côtoyées essayaient de récolter mon colostrum en me faisant patienter avant de pouvoir sortir de cette maudite salle. J’ai enfin pu me déplacer, sur mon lit, bien sûr. Ils m’ont roulée jusqu’en néonatalogie. J’ai enfin pu voir mes petites. Elles étaient plus grandes que je l’avais imaginé, plus formées; elles étaient parfaites. Juste trop branchées. Je n’ai pas pu prendre mes petites.
Malheureusement, ce n’est pas toutes les infirmières qui veulent déplacer les bébés dans de telles conditions. Même si le CHUL prône la méthode kangourou, ce n’est pas si simple. Il y a beaucoup de fils et de machines à prendre en considération. J’avais trois bébés et je ne pouvais même pas en prendre une.
Je suis retournée à ma chambre sans bébé, c’était si vide. Je faisais la navette en chaise roulante entre ma chambre et la néo’. Je tirais mon lait au trois heures pour nourrir ces petites. 1 mL, 2 mL, que j’allais porter tout fièrement en espérant pouvoir les nourrir toutes les trois. Dès la deuxième journée, j’allais, en marchant, voir mes cocottes. Ce n’était pas difficile de me remettre de la césarienne, j’étais plutôt soulagée de ne plus avoir tout ce poids dans mon ventre et trois bébés qui siphonnaient toute mon énergie.
J’ai eu mon congé de l’hôpital après seulement deux jours. Je suis sortie toute seule, en laissant mes bébés entre les mains des spécialistes. J’ai fait le voyage entre la maison et l’hôpital 2-3 fois jusqu’à ce que nous puissions les ramener.
Les filles n’étaient pas dans le même incubateur, elles étaient séparées. Ça me désolait énormément et j’avais l’impression qu’elles s’ennuyaient les unes des autres. Ce n’est qu’après quatre jours qu’une infirmière a eu pitié de moi quand j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, en me déplaçant entre deux salles. Je lui disais : « J’ai trois enfants et je ne peux même pas en prendre une. En plus d’être séparées l’une de l’autre, elles ne peuvent même pas sentir la peau de leur mère. »
Enfin, le premier peau à peau. Une petite dans mes bras, si petite et si fragile (même pas 3 livres!). Deux heures à la contempler, à espérer ne pas lui faire mal, mais en ayant toujours en tête qu’il y avait deux autres de mes filles dans la salle voisine avec qui je ne pouvais toujours pas faire du peau à peau. Ce n’est que quelques jours plus tard que nous avons enfin pu les tenir dans nos bras.
Mes filles ont été 75, 76 et 78 jours en néonatalogie. Les journées étaient longues, stressantes et je devais toujours me séparer en trois. J’avais l’impression de ne pas passer de temps avec chacune, mais ce sera maintenant l’histoire de ma vie!
Je suis une maman qui doit se séparer en quatre.