Lorsque la nouvelle est arrivée, je ne l’ai pas cru. Moi, Marc-André, père d’une adolescente? Impossible. Ben, peut-être pas si impossible puisqu’après tout je me rappelais d’une histoire en particulier que j’ai vécue à l’aube de ma vingtaine.
En effet, les résultats d’une échographie et la possibilité qu’un autre homme soit le père de cette enfant faisaient en sorte que j’étais d’un scepticisme rare. Lorsque j’ai parlé à l’Ex au téléphone, je suis resté prudent. J’entendais ce qu’elle me disait sur la ressemblance et tout avec mon hypothétique fille, mais je n’étais pas convaincu. Avant d’aller plus loin, je lui ai proposé de faire un test d’ADN pour enfin mettre cette histoire au clair.
Le jour du test, nous nous sommes rejoints au rez-de-chaussée de la clinique médico-légale. À ce moment, je demandais toujours à ne pas rencontrer ma fille afin de ne pas créer d’attente si le résultat s’avérait négatif. C’est donc chacun de notre côté que nous avons bavé, littéralement, sur des Q-tips. Après quoi, j’ai sellé l’enveloppe et l’ai déposé à l’accueil qui se trouvait au 19e étage.
Il ne restait plus qu’à attendre. Ça et se faire mille et un scénarios. Ça allait de « C’est juste impossible » à « La vie est tellement imprévisible que je vais être père! » Nul besoin de dire que ma blonde s’est fait aussi prendre dans ces montagnes russes. Nous alimentions mutuellement nos imaginaires.
Les jours passaient. Puis les semaines. C’était long. Trop long! Avec les vacances du temps des fêtes, les délais étaient allongés et c’était avec impatience que nous attendions le facteur. Je passais beaucoup trop de temps à l’attendre en regardant par la fenêtre. Ma copine et moi étions de plus en plus convaincus que j’étais père. Il faut dire que nous avions un peu stalké son Facebook et son Instagram, puisqu’à 14 ans elle a déjà bien apprivoisé ces réseaux.
Puis, l’enveloppe tant attendue est enfin arrivée. J’avais le coeur qui battait à tout rompre. Je pense même que je shakais. J’ai appelé ma douce : « T’arrives-tu? J’ai les résultats, mais je ne veux pas les ouvrir seul. » Même pas le temps de déstresser un peu qu’elle était là. J’ai ouvert l’enveloppe.
Trop de mots, trop de chiffres jusqu’à ce que je vois « le père » et « 99.99998% ». Les émotions s’enchaînent à un rythme effréné. La joie, la tristesse, l’excitation, la culpabilité, le bonheur, la peur, tout y était dans un désordre étourdissant. Je pleurais en même temps que je riais. J’avais bien fait d’attendre ma blonde, car elle est d’une douceur salvatrice.
Après cet intense tourbillon, je contacté l’Ex pour savoir si elle avait aussi reçu les résultats. Puisqu’elle n’avait pas reçu l’enveloppe, nous avons décidé que je jouerais les facteurs. Je me suis donc rendu chez ma fille accompagné de ma copine. Tout allait tellement vite soudainement que j’avais l’impression d’être sortie de mon corps et me tenir à côté de celui-ci.
Arrivé à l’appartement où résident ma fille et sa mère, le stress monte d’un cran. La porte s’ouvre et je vois pour la première fois cette belle grande adolescente qui met quelques secondes à comprendre ce qui arrive. À la voir, on devine le tourbillon d’émotions qu’elle vit. On parle tous ensemble lorsque ma blonde, l’Ex ainsi qu’une nièce de cette dernière quittent le salon pour nous laisser du temps seul. Je ne saurais dire le nombre d’heures exactement, mais nous avons beaucoup parlé ce soir-là.
Avant de partir, ma fille et moi nous échangeons nos numéros de cellulaire. Ouan, j’apprends que j’ai une fille et on s’échange nos numéros le même jour, signe qu’on est bien en 2015. À ce moment, ma fille demande quel nom écrire au contact. Comme un innocent, je lui dis mon nom, mais je comprends dans le visage de ma blonde et de l’Ex que ce n’est pas mon nom qu’elle demande. C’est plutôt pour savoir si elle peut écrire papa.
Ça y est, je suis papa!