Huez-moi, si vous le voulez. La première personne mise au courant de ma grossesse n’a pas été l’Amoureux, ni ma sœur, ni ma BFF, ni ma maman. Celle qui a d’abord connu mon état de femme enceinte a été ma patronne. Hu! Hu!
C’était le début de l’été, le début des vacances. Nous étions attablées sur une terrasse. Il y avait de la bière et du rosé. Le temps était doux.
Mon cellulaire a vibré. Au bout du fil, une infirmière (avec une voix que je ne connaissais pas) a dit :
« — Vous êtes enceinte.
Je n’ai pas répondu.
— Madame, êtes-vous là?
— […]
— Madame, le test est positif. Vous êtes enceinte.
— Pouvez-vous répéter? Ai-je demandé.
— Vous êtes enceinte ».
L’infirmière a dit et redit ce qui me semblait inconcevable. J’attendais un bébé. Et tout le monde l’a appris en même temps que moi. Il n’y a pas eu de secret.
L’annonce aurait-elle dû se faire autrement? Après coup, je ne crois pas. Dès que j’ai connu mon état de femme enceinte, je l’ai annoncé sur Facebook. J’ai même fabriqué des t-shirts où je me suis dessinée avec un ventre rempli par un bébé qui flottait dans mon intérieur. J’étais heureuse. Et ébranlée. Et j’avais peur.
Peur de perdre le bébé. Peur de cette fausse couche possible qui touche une femme sur trois. Peur de cette fatalité aussi puissante et destructrice que le cancer (oui, je suis intense).
Peur de ce pourcentage énorme : une grossesse sur quatre n’aboutit pas. Peur de ce qu’on ferait ensuite avec le bébé : les comprimés puissants avalés pour provoquer des contractions violentes. L’expulsion du fœtus ou la vidange à l’aide d’un curetage.
La couche « qui n’est pas vraie »
Porter la mort. Au lieu de voir le ventre s’arrondir, le voir se vider. Rejeter des averses de sang. Que l’intérieur de l’utérus tissé point par point que j’ai surveillé au millimètre près soit subitement nettoyé. Qu’il faille oublier ça, en quelques heures (ou jours), comme si ce n’était rien. Jamais, je n’aurais voulu vivre une fausse couche en silence.
J’ai tenu à annoncer ma grossesse dès le début. Que tous se réjouissent du résultat de mes sept ans de travail en clinique de fertilité. J’ai voulu qu’on suive les étapes de cette mise en chair d’un être si spectaculaire. Et que ce soit toute la terre qui cesse de respirer avec moi, avec nous (mon bébé et moi) si jamais la mort devait arriver.
Lancez-moi des roches, peut-être, mais il me semble qu’une femme devrait être libre d’annoncer sa grossesse quand bon lui semble, sans préjugés. Vous en pensez quoi?