Aujourd’hui, ma fille de 4 ans et demi m’a demandé si son père avait oublié qu’il devait venir la chercher ou s’il avait autre chose à faire. Pas besoin de vous dire qu’un petit bout de mon cœur est mort. La vérité, que je ne lui ai pas dit et ne lui dirai jamais, c’est qu’il semblerait que son père avait plus important à faire.
La vérité, c’est qu’en effet, la si belle valeur du travail forcené qui lui a été inculqué par son propre père passe devant beaucoup de choses. Jamais il ne le dira, ni ne l’assumera, mais il va toujours faire passer les rénovations, réparations ou encore les travaux de son frère/père/ami/beau-père avant le temps qu’il doit passer avec sa fille. Les raisons d’aller aider les autres sont toujours plus valables à ses yeux que de s’occuper de sa fille.
Il va par contre crier sur tous les toits qu’il s’ennuie à mourir de sa fille, que c’est pénible de ne la voir qu’une fois toutes les deux semaines. Il le dit parce que c’est ça qu’il faut dire, socialement. Il a par contre oublié que les gestes valent plus que les mots, surtout pour un enfant.
Évidemment, on ne dénigre pas l’autre parent devant l’enfant, ce serait dénigrer une partie de notre propre enfant. Je n’ai pas flanché, pas plus cette fois qu’une autre. Mais cette fois, elle m’a fait mal. Mon cœur s’est serré et j’aurais voulu m’excuser. M’excuser d’avoir choisi ce papa-là pour elle. Je l’ai juste serrée dans mes bras et je lui ai rappelé qu’elle était plus importante que tout au monde et que je l’aimais.
Puis là, j’ai compris. J’ai su qu’elle comprenait quand elle m’a demandé si c’est pour cela que je « faisais des choses avec elle au lieu de faire mes choses à moi », ce sont ses mots exacts. J’ai dit oui, puis nous avons continué à colorier en silence, colorier les dix dessins qu’elle préparait pour lui en attendant qu’il arrive. Elle était si contente de le voir, il était si content qu’elle soit excitée d’aller passer du temps avec lui. Mais moi, j’avais mal. Comment un enfant de 4 ans peut en venir à se demander si son parent a oublié qu’il venait le chercher?
Des milliers d’actes sont revenus me hanter. Les fois où il a donné la responsabilité à ma fille de l’appeler, elle, pendant la semaine. Comme ça, il n’avait pas à y penser ou à se culpabiliser s’il n’appelait pas, parce que, t’sais, elle non plus. La fois où il n’est pas venu à son spectacle de fin d’année, parce que si, parce que ça. Et j’en passe.
J’ai pleuré et j’ai pleuré encore, j’ai espoir qu’il se réveille avant de reproduire le schéma de son enfance : l’absence de son propre père. J’espère qu’il assumera ses responsabilités bien avant qu’elle soit en âge de lui dire elle-même qu’il est absent. J’espère surtout que ma fille ne sous-estime pas sa valeur à cause des agissements de son parent.