Il y a un peu plus d’un an, j’ai fait le choix de me retirer du marché du travail pour m’occuper de ma fille comme je l’explique ici. Depuis, ma deuxième s’est pointé le bout du nez et je peux maintenant dire que j’ai pris la bonne décision. Tout simplement parce que je commence enfin à goûter au bonheur alors qu’avant je me contentais de le chercher.
N’empêche que depuis que les médias discutent des comportements inappropriés et des inégalités vécues par les femmes, j’ai parfois l’impression que mon choix va à contre-courant. C’était peut-être acceptable pour nos grand-mères et même nos mères de ne pas travailler, mais ça l’est pas mal moins pour une femme émancipée et éduquée comme moi qui a accès aux CPE de surcroît.
Mais c’est justement en tant que femme émancipée que j’ai décidé d’arrêter de travailler. Personne ne m’a imposé d’être à la maison. Je ne dépends pas totalement de mon mari non plus comme on peut se l’imaginer. Nous avons pris cette décision éclairée ensemble tout en nous assurant que je sois protégée financièrement en cas de pépin. D’ailleurs, celui qui partage ma vie participe aussi aux tâches quotidiennes et saisit toutes les occasions possibles pour être avec nos filles. Ce qui me permet de prendre du temps pour moi.
Reste qu’on n’accorde pas une grande reconnaissance aux femmes qui décident de rester à la maison et encore moins aux hommes qui prennent la même décision. La femme d’aujourd’hui s’accomplit au travail et elle est capable de s’occuper de ses enfants en prime. C’est ce modèle qu’on valorise.
C’est pourquoi j’ai souvent l’impression qu’il est préférable que je taise mon choix afin d’éviter les remarques réductrices. On me fait parfois sentir que je m’abrutis en restant à la maison. Que je gaspille mes capacités et que je ne profite pas de toutes les opportunités qui s’offrent à moi. Qu’il n’est pas possible que je puisse m’épanouir pleinement. Après tout, pourquoi avoir tant étudié et entamé un parcours professionnel si je suis pour tout abandonner dès qu’un enfant débarque dans ma vie?
Ce qui est cocasse, c’est que les commentaires qui reviennent le plus souvent sont assez contradictoires. Soit je me fais dire que je dois être bien en vacances à longueur d’année, soit on pense que ça doit être pénible de s’occuper de mes enfants à temps plein. Pourtant, je ne passe pas mes journées en pyjama à écouter Netflix et je ne me tire pas constamment les cheveux non plus.
Au-delà des préjugés, je pense que mon rôle est parfois incompris au sein d’une société qui accorde une importance démesurée à tout ce qui rapporte de l’argent. Loin de moi l’idée de diminuer les parents qui se dédient à leur carrière ou qui n’ont tout simplement pas le luxe de faire le même choix que moi. Au contraire, je leur lève mon chapeau. L’important, c’est de trouver son équilibre dans cette course folle contre le temps. Et c’est ce que j’ai fait.
Est-ce que mon retour éventuel sur le marché du travail sera plus difficile? Peut-être bien, mais du travail, il y en aura toujours. Les moments précieux que je partage avec mes filles ne reviendront pas, eux. Ça me comble entièrement d’être à temps plein avec elles. J’espère que ma décision les aidera à comprendre qu’il est possible d’aller à l’encontre de ce qui semble être acceptable socialement, même si, pour ça, il faut éviter de s’alimenter des préjugés des autres et, surtout, des nôtres.