Je me suis levée un matin et elle faisait des phrases complètes : « Réveille-toi maman, je veux jouer dans le salon. » Si simplement. Je le réalisais pour la première fois, elle n’était plus un bébé.
Pourtant, je fermais les yeux et je pouvais revivre la scène où, à un mois, ma fille a été hospitalisée. Le moment où son père et moi avions compris que la route, une longue suite de premières fois, serait plus cahoteuse que prévu.
J’ouvrais mes paupières pour la regarder du haut de ses 2 ans. Sa personnalité qui prenait forme, ses mimiques et son regard. Au fil des échanges de la matinée, cette petite-devenue-grande ajoutait maintenant des adverbes à ses expressions : « Oui maman, vraiment vraiment. » Son mimétisme me faisait rigoler. J’étais tellement fière d’elle.
J’ai perdu espoir de nombreuses fois. J’ai cru que je n’avais plus la force. J’ai sombré, imploré, demandé des miracles. J’ai envié la vie des autres, si facile de ma perspective. J’ai compris que ces familles avaient aussi leurs défis.
Tellement d’amour, de fatigue, d’inquiétude et de soins sont mobilisés en faveur de la santé de nos enfants. Je me trouve naïve d’avoir cru que, pour nous, ce serait différent. Que je n’y laisserais aucune plume en passant. Et pourtant, je ne referais rien autrement.
Notre maternité est faite d’expériences diverses, de contextes et d’apprentissages qui nous sont propres. Elle est le fruit de notre éducation, de notre famille, de notre parcours, de qui nous sommes, de rencontres, de lectures et de discussions.
Cette courtepointe qu’est ma maternité est tissée de ces legs, d’embûches, de moments doux et de souvenirs soyeux. Les heures et les efforts investis dans sa confection me semblent enfin moins lourds. L’habitude des gestes et les habiletés acquises apportent une légèreté au résultat qui se forme lentement.
Ma fille est là devant moi, à faire le clown et à me narguer, l’air de me dire « T’as bien fait de t’accrocher, tout finit par passer ».