Bébé 2 est né huit jours après le décès de notre fille qui était polyhandicapée, ou plus spécifiquement le lendemain de ses funérailles.
Plusieurs nous ont dit qu’elle a attendu l’arrivée imminente de son petit frère pour prendre son envol, pour ne pas nous laisser seuls trop longtemps son père et moi. Il est vrai que l’arrivée de bébé 2 a mis un baume sur nos cœurs. Sans dénier le deuil de notre fille, il a mis du beau dans nos vies et nous a obligés à nous retrousser les manches.
Je n’avais toutefois pas prévu que, outre une grande tristesse, une autre émotion allait s’inviter chez moi : l’anxiété. La crainte que la maladie ou la mort s’invite à nouveau sans s’annoncer. La peur de perdre, une fois de plus, ce qui m’est le plus cher.
Malgré le fait qu’une biopsie faite à la fin du premier trimestre de ma grossesse ait révélé que bébé 2 était en parfaite santé, je le scrutais sous tous ses angles durant les premiers mois. Est-ce qu’il nous regardait suffisamment? Est-ce qu’il avait assez ou trop de tonus? Est-ce que sa tête grossissait bien? Et surtout, est-ce qu’il allait, lui aussi, cesser de respirer à notre insu? Évidemment, il dormait avec nous et je vérifiais sa respiration maintes fois durant la nuit (et durant le jour!). Je savais qu’il était en santé et que la mort de sa sœur était indirectement reliée à sa maladie, mais c’était plus fort que moi. J’avais perdu confiance en la vie.
Bébé 2 a maintenant près de 3 ans et demi. Je sais que son développement se déroule normalement et que les risques de mort subite du nourrisson sont écartés, mais les scénarios catastrophiques n’ont pas quitté ma tête. Je suis devenue experte pour repérer les dangers potentiels que ce soit un module de jeux trop haut, une rue trop accessible, une toux trop grasse… Et c’est franchement épuisant!
Bébé 3 est arrivé dans notre famille il y a quelques semaines. Les mêmes craintes sont de retour. De plus, un souffle au coeur détecté lorsqu’il avait un mois et demi a causé tout un émoi. Les tests ont finalement révélé que son coeur est parfaitement normal, mais je me suis (trop) rapidement imaginé le pire. Car avec notre fille, rien n’était banal. Tout tournait toujours au pire, ou presque.
Je suis consciente que je dois éviter de surprotéger mes fils et de leur transmettre mon anxiété. Je ne veux pas qu’ils développent la croyance que le monde est dangereux ou qu’ils ne deviennent pas suffisamment autonomes.
J’avoue que l’idée d’enrouler mes fils dans du papier bulle m’a traversé l’esprit, mais j’essaie plutôt de faire en sorte que mon anxiété les brime le moins possible. J’essaie de remplacer mes scénarios catastrophes par des pensées plus réalistes. Lorsque l’envie de les surprotéger devient trop forte, j’essaie de tempérer mon anxiété. J’essaie de prendre sur moi quand ça ne va pas, pour leur bien. J’essaie aussi de me raisonner en me disant que m’inquiéter à outrance n’empêchera pas nécessairement le pire d’arriver, mais me privera de vivre pleinement le moment présent avec ma famille. Je dis bien que « j’essaie » de faire tout ça, car la bataille est loin d’être gagnée.
Plusieurs raisons peuvent faire en sorte que nous soyons anxieux comme parents, pas seulement la maladie et la mort d’un enfant. L’important est de le conscientiser et de tenter de s’améliorer, en allant chercher de l’aide s’il le faut.
Êt vous, êtes-vous un parent anxieux? Quels sont vos trucs pour gérer votre anxiété?