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Avoir un seul enfant
Crédit: Pexels

Que ce soit par choix ou dû aux aléas de la vie, avoir un seul enfant change un peu la manière dont on perçoit les différentes étapes. Dans un sens, chacune d’elle est à la fois la première et la dernière. Cette constatation me crée un stress de performance dans lequel il est facile de me perdre.

 

J’ai quelques regrets face à ma maternité. J’aurais aimé essayer plus fort, aller chercher de meilleures ressources et réussir l’allaitement. J’aurais aimé prendre plus de belles photos de ma grossesse et de mon accouchement. J’aurais aimé faire un cours avec mon bébé. J’aurais aimé tricoter un petit quelque chose de doux et très personnel pour elle. Tous ces petits riens que je promettais de faire alors que j’attendais toujours mon deuxième, parce qu’avec le recul et l’expérience, je voulais faire les choses un peu différemment. Mais, plus les années passent et plus je me fais à cette idée. Il n’y aura pas de deuxième prise pour la maman que je suis.
 
Je suis l’aînée chez moi, j’ai un peu l’impression que « j’ouvrais le chemin » aux autres. J’étais un peu le cobaye de mes parents et ma bonne conduite d’adolescente a ouvert les portes de la permission au reste de la fratrie. Du moins, c’est un peu ainsi que je concevais les choses. Je me suis souvent dit que mon premier contact avec la parentalité serait l’ébauche du parent que je souhaite vraiment être. Comme un premier jet de mère, qui serait peaufiné et remodelé lors d’une deuxième expérience.
 
Mais voilà, je n’aurais pas de seconde chance. Un peu comme un examen stressant qu’il faut que je réussisse du premier coup. Tout le temps. Chaque étape qu’on franchit, je la vis avec les angoisses de la première fois, cette peur qu’on ressent parce que c’est déjà le moment et qu’on ne se sent pas prêt, qu’on ne sait pas trop comment s’y prendre ou si on y arrivera de manière optimale. Mais aussi, depuis les dernières années, je le vis comme un petit deuil, parce que cette étape qu’on franchit ne reviendra peut-être jamais.
 
La dernière visite du Père-Noël. Le dernier deux piastres de la Fée des dents. La dernière journée d’école, peu importe l’année. La dernière couche, la dernière poupée, les dernières bottes achetées du côté enfant. Cet été, ce sera vraisemblablement le dernier camp de jour.
 
On entend souvent ceci : « Je n’ai plus de bébé » lorsque son petit dernier franchit une étape importante de son développement. Moi, sans que je ne l’aie pleinement choisi ou tout à fait réalisé, mon bébé est aussi cette enfant qui ouvre les voies, modèle mon comportement parental ET qui me fait constater que le temps roule et court.
 
Il y a des moments où le regret est si présent, j’ai l’impression d’être passée à côté de certaines de choses importantes sans tout à fait réaliser qu’elles s’envolaient pour toujours. Alors, je me rappelle certains moments, certains gestes que j’ai eus. Parmi tous ces regrets, il y a aussi plusieurs moments dont je suis fière d’avoir laissé s’épanouir.
 
Je n’ai jamais regretté d’avoir bercé ma fille tous les soirs pour qu’elle s’endorme dans mes bras, malgré ses deux ans passés et les commentaires que j’en recevais. Je n’ai jamais regretté d’avoir pris une heure ou deux sur mon travail dès que possible pour aller assister à une représentation en classe ou aider l’enseignante avec une activité particulière. Je n’ai jamais regretté d’avoir pris la journée de son anniversaire en vacances ou en congé. Je n’ai jamais regretté non plus de m’être autant investi sur ses déguisements d’Halloween dès la mi-septembre.
 
La mère en moi est en constant apprentissage, j’avais tort de croire que tout serait acquis et maîtrisé pour un autre enfant. Mon deuil de n’avoir pas la chance d’être mère à nouveau comprend aussi cette appréhension qu’il n’y aura pas de deuxième manière, de deuxième chance de vivre chaque étape.
 
Mais, au jardin de mes regrets et de mes déceptions, je choisis de cultiver la plus belle de toutes mes fleurs :  la fierté qui émane de mon cœur de mère. Celle qui fait que malgré mes erreurs et mes chagrins, j’ai toujours cherché à faire de mon mieux pour faire d’elle une femme merveilleuse (ce qu’elle promet d’être).


Crédit : Photo personnelle – Geneviève Bédard
 
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