Note de l’auteure: Je ne suis ni pro-allaitement ni pro-biberon. Je respecte le choix de chaque parent et de chaque maman. Je crois qu’on doit faire les choix qui sont les bons pour nous, notre enfant et notre famille. J’ai fait le choix d’allaiter, mais ça n’a pas fonctionné et j’ai eu de la difficulté à l’accepter. Merci de respecter mon témoignage.
Quand j’ai su que j’étais enceinte, il n’y a pas eu de questionnement : je voulais allaiter. Point barre. Quand on me demandait si je désirais allaiter ou donner le biberon, je répondais que je voulais allaiter, mais que je me faisais une réserve de biberons et de lait maternisé, au cas où. Je ne pensais pas vraiment avoir à m’en servir. Quand mon troisième trimestre a débuté et que mes seins ont décidé de commencer à couler, je m’imaginais déjà en train d’allaiter, le regard perdu dans les yeux de ma fille.
Loin de moi l’idée que la réalité pouvait être différente. J’allais bientôt « rentrer dans un mur ».
Durant le peau à peau, ma fille n’a pas voulu boire. C’est dans sa première nuit que l’infirmière a décidé qu’il était temps qu’elle se décide de téter. J’ai manqué de colostrum à son trente heures de vie et comme nous devions faire attention avec sa glycémie, elle devait se nourrir d’une autre façon. J’ai pleuré, pleuré comme je l’ai rarement fait dans ma vie. Mon mari a dû appeler l’infirmière et lui dire de venir nous porter un biberon. La culpabilité m’a envahie : celle de ne pas offrir à ma fille ce dont elle avait besoin. Après trente heures dans mon nouveau rôle de maman, j’avais déjà l’impression d’échouer. Sans le savoir, en me créant cette image d’un allaitement facile, perdue dans mes idéaux imaginaires, je m’étais mis de la pression. Je m’étais forgé cette image de ce qu’une maman devait faire et je ne pouvais pas; mon corps ne le produisait pas.
Ma montée laiteuse fut tardive; elle est arrivée une semaine après mon accouchement. J’ai tiré ce que j’étais capable en lui donnant au biberon, essayant de la remettre au sein. C’est lorsqu’elle a atteint un mois que j’ai arrêté d’essayer. Notre dernière tentative d’allaitement s’est terminée en un cri que je n’arrive toujours pas à décrire. Un cri qui ne pouvait pas venir d’une si petite chose fragile, un cri qui résonne encore par moment dans mon être, comme un effroyable écho.
Cette culpabilité de ne pas pouvoir allaiter m’a habitée durant les premiers mois de mon rôle de maman. Je voyais mes amies le faire si (trop) facilement et ces mamans qui allaitaient ouvertement au centre d’achat; je leur en ai voulu. Je leur en ai voulu de réussir où j’avais échoué, voulu de partager ces moments avec leurs enfants. Je leur en voulais et je les jalousais. Sans le savoir, chaque femme me faisait revivre ce matin à l’hôpital où j’ai dû prendre la décision de donner le biberon et me faisait aussi revivre ce sentiment de culpabilité.
En réalité, j’étais en colère contre moi de ne pas accepter la situation et de faire le contraire de ce que je m’étais promis. Je ne voulais pas être celle qui se met la pression au point d’en être malade. Avec le temps et beaucoup de travail sur moi, ma culpabilité a disparu. La vue du biberon ne me faisait plus honte. J’ai dû faire un deuil de l’allaitement tel que je me l’étais imaginé.
Pendant des mois, je disais à tout le monde que c’était correct que mon allaitement n’ait pas fonctionné, que c’est la vie et que je vivais bien avec ça. La réalité était toute autre et je n’étais pas réellement bien. Donc, à toutes les nouvelles et futures mamans, je vous dis ceci : ne faites pas comme moi, ne vous rendez pas malade. Il faut accepter que tout ne se produise pas comme on l’avait prévu, accepter les alternatives et oublier la culpabilité.
Avez-vous dû faire le deuil de l’allaitement?