J’essaie. Très fort. J’essaie de passer par-dessus. Pardonner. J’essaie de cheminer, d’évoluer. J’essaie d’accepter sa main tendue. Mais je réalise que ma perception d’elle est encore trop tordue. L’aide toxique. Est-ce vraiment de l’aide? Quand tu es dépassée par la maladie dans ta maisonnée et qu’on t’offre une opportunité de relevailles, l’aide rendue frise usuellement l’héroïsme, non? À quoi bon s’embourber et refuser le coup de main tant souhaité? Parce que certaines personnes ont cette manière de vous aider qui vous pollue la pensée. Il faut donc choisir en fonction de se protéger.
Pour ceux et celles qui m’ont lue, il y a quelques années, j’ai écrit « ma belle-mère est un monstre ». Il y a pire monstre qu’elle, on s’entend. Le gros hic, si vous vous rappelez l’histoire, c’est qu’elle a cru, pendant plus de deux ans, à force de similitudes avec son fils – mon mari- qu’elle était la mère de mon enfant. Ceci a été admis, exprimé et discuté avec elle. Cette délicate situation a dû être aussi décortiquée, de mon côté, maintes fois avec un psychologue. Parce qu’après deux ans, tu finis par avoir trop mal en dedans. Côtoyer la folie, ça rend fou.
Ceci étant dit, je m’en suis techniquement remise. Je n’ai pas pour autant regagné confiance en son jugement. Dans les faits, elle n’est pas si monstrueuse. Elle ne me lapide pas. Elle ne me critique que maladroitement. Ça fait mal, mais pas tant que ça. Elle ne tente pas de saccager notre mariage ou de se réapproprier notre enfant.
Elle est toujours bien intentionnée, généreuse et aimante envers nos cocos. Elle est disponible, surtout. Mais que vaut ce temps, quand il n’apporte pas que du bon? Elle est têtue, certes, mais pleine d’affection. Elle est humble, motivée à nous aider, mais ne cesse de piétiner nos demandes et souvent porte atteinte à notre sécurité. Elle aide. Ça oui.
Mais elle aide par imposition, sans se soucier de nos choix ou nos restrictions. Elle répète les mêmes infractions, même si on lui indique la bonne façon. Elle s’immisce dans notre gestion, financière ou médicale, familiale ou sociale. Elle se fait caporale de notre maisonnée, sans qu’on le lui ait demandé.
Elle nous déconstruit à coups de non-écoute, d’entêtement et de manque de jugement. Elle refuse d’évoluer et d’entendre nos souhaits, en matière d’éducation. Elle s’évertue à appliquer des méthodes expirées, malgré les incidents qui en ont découlé et qui ont pratiquement coûté, à plusieurs reprises, la vie de mon grand garçon. J’ai, pour ainsi dire, eu à utiliser le RCR et je m’en rappellerai comme si c’était hier. On n’oublie pas ce genre de choses. On pardonne. Puis, on se façonne une relation qui nous adonne.
L’instinct d’une mère. Je ne peux plus le taire. Le flair aiguisé m’indique constamment la prudence, en sa compagnie. Ma confiance en elle stagne et dévalue. Chaque tentative d’avancée en matière de soins apportés me fait reculer d’un pas dans notre marche commune vers une entente mutuelle.
J’en ai marre de mentir, pour décourager sa venue. Je me dénature parce que je n’ai pas le courage de lui dire, en toute franchise, que je doute encore de son équilibre mental. Et encore moins mon conjoint, lequel est aussi associé professionnellement avec elle.
Je manque de guts, mais je ne manque pas de respect à mon homme, qui n’a pas le choix de maintenir une relation saine avec sa mère et partenaire d’affaires. Lui aussi, d’ailleurs, est tanné de mentir à sa propre mère. Comment se sortir de cette impasse? On consulte, check. On met des limites, check. On attend que le temps passe. On laisse un peu de lousse dans la corde, à mesure que les enfants grandissent.
Et quand l’aide est plus que bienvenue, je l’accepte par dépit, je ferme mon cœur aux heurts, je remercie la vie pour sa générosité et surtout, je reste dans les parages pour me rassurer et mettre des balises de sécurité.
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