À quelques jours de donner naissance à mon deuxième fils, je me surprends à vivre (encore!) une multitude d’émotions contradictoires. J’ai l’immense privilège de vivre une grossesse, somme toute, agréable et facile. Pour une deuxième fois, un petit être humain a choisi mon bedon comme première maison et j’en suis extrêmement reconnaissante. C’est le corps lourd de bébédaine, de jambes enflées et de sacro-iliaque coincé que j’anticipe la fin de ma grossesse.

Évidemment, je suis impatiente de rencontrer mon nouveau bébé et qu’il fasse la connaissance de son papa et de son grand frère. J’ai hâte de frotter mon nez dans ses petits cheveux tout fins, de le regarder dormir et m’extasier devant ses premiers sourires. Mais j’appréhende aussi les changements que ça va apporter à la dynamique familiale, le manque de sommeil, la nouvelle routine… je sais que le 4e trimestre est exigeant.

J’anticipe le vide que laissera mon bébé dans mon ventre. Ce bedon que je flatte consciemment et inconsciemment tout au long de la journée. Ce gros bedon dur et plein de vie, celui que je cogne plusieurs fois par jour dans la maison parce que les distances sont plus difficiles à évaluer. Celui qui se déforme avec chaque coup de pied. Celui qui prend vie, qui évolue et qui s’étire au rythme de la grossesse. Je redoute de le sentir vide, de me sentir vide.

Je me souviens de la première fois que j’ai posé les mains sur mon ventre vide après l’arrivée de Minilove et de l’avoir flatté involontairement quelques instants avant de me rendre compte qu’il n’y avait plus rien à caresser à l’intérieur. Le mélange d’émotions qui m’a traversé à ce moment était intense. Ce ventre, si protecteur et douillet quelques jours auparavant, n’était plus que ce qu’il est à la base: un ventre. Un bedon bien moins utile lorsque vide que rempli de bébé. Comme si le miracle qu’il protégeait si précieusement était maintenant disponible à tous. Égoïstement, cette transition qu’est la naissance me donne l’impression d’avoir à partager ce petit bébé avec les autres. Lui, qui n’était connu que par moi depuis toutes ces semaines, devient subitement le centre de l’univers d’autres personnes.

Je sais très bien que mon fils sera entouré de personnes extraordinaires et qu'il évoluera dans une famille qui a déjà tellement hâte de le rencontrer. Je sais que, rapidement, mon cœur va se remplir d’amour pour ce petit être. Et quand mon cœur sera tellement rempli, je sais que mon bedon vide ne me dérangera plus. Mais, en ce moment, je n’ai pas envie que ça se termine.

Avez-vous déjà ressenti ce sentiment de vide ?