Je suis une enfant du divorce. Rien d’extraordinaire là-dedans. Par contre, il y a vingt-cinq ans, c’était beaucoup moins fréquent et notre garde partagée n’était pas conventionnelle. À cette époque, les mères obtenaient presque automatiquement la garde des enfants et les pères avaient le droit de voir leurs enfants une fin de semaine sur deux. Heureusement, notre société a fait beaucoup de progrès de ce côté-là!

Mais voilà qu’il y a vingt-cinq ans, ça n’a pas plu à mon père de voir ses filles seulement un week-end sur deux. Il a donc décidé de revendiquer ses droits et son désir d’obtenir une garde partagée égalitaire. Et il a gagné! Il a ainsi obtenu une garde de six mois par année. Pendant les six mois où nous vivions chez mon père, nous visitions ma mère une fin de semaine sur deux et un soir par semaine, nous soupions avec elle. Lors des six mois où nous habitions chez ma mère, c’était le contraire. 

Évidemment, élever chacun de son côté deux petites filles de 3 et 6 ans n’est pas une mince affaire. Mes parents ont dû relever plusieurs défis et cela a demandé beaucoup d’adaptation de la part de tous. Entre autres, mon père a dû cuisiner davantage, apprendre à nous faire des tresses lors de la saison des poux à l’école et avoir de longues discussions (un brin gênantes, j’en conviens) sur les menstruations, les relations sexuelles, etc. Ma mère a dû exercer beaucoup de lâcher-prise et travailler sa confiance. Ils ont aussi dû mettre leur ressentiment de côté. 

Malgré tout, nous avons toujours senti, ma sœur et moi, que nous étions au cœur de leurs priorités et que leurs choix étaient toujours faits en conséquence. Avec le temps, leur relation est devenue de plus en plus cordiale, pour le plus grand bonheur de tous. 

Avec du recul, je me rends compte que mes parents ont fait le bon choix, car ils ont des personnalités opposées et ils semblent beaucoup plus heureux ainsi. Il n’y a peut-être plus d’amour entre eux, mais lors de leur séparation, ils se sont rappelé qu’il y en avait déjà eu et qu’ils nous avaient faites à deux. Il était donc naturel qu’ils continuent à prendre soin de nous à deux. En dépit de leur divorce, nous avons toujours été une vraie famille et c’est ça le plus important! 
 

Le mot de l’experte

Heureusement, les droits parentaux ont beaucoup évolué depuis le divorce de mes parents et on peut affirmer, sans présomption, que la garde partagée est maintenant favorisée quand la capacité des parents est établie. Afin de m’éclairer davantage sur le sujet, je me suis entretenu avec Me Catherine Leblanc, avocate spécialisée en droit familial au cabinet Brodeur, Prémont, Lavoie à Québec. 

Voici les points importants de notre entretien :

Les types de gardes

  • La garde exclusive : L’un des deux parents a la garde des enfants 80 % du temps ou plus. 
  • La garde partagée : L’un des parents a la garde des enfants 146 jours par année. Donc, 40 % du temps. Ces jours ne sont pas obligatoirement consécutifs et peuvent être divisés de façon à bien convenir au mode de vie des parents.
  • Accès élargi : L’un des parents a accès aux enfants entre 20 % et 40 % de l’année (entre 76 et 146 jours).

L’âge des enfants

L’âge des enfants est un point essentiel à considérer. Plus l’enfant est jeune, plus les tribunaux favorisent des accès plus courts, mais plus fréquents, afin qu’il s’ennuie moins. Par exemple, 3 jours/2 jours/2 jours ou encore 4/3/3/4. 

Par contre, en vieillissant, certains enfants peuvent être lasses de faire sans cesse leurs valises et préfèrent passer à une garde plus longue : une semaine sur deux, 2 semaines/2 semaines ou même au mois. Ces changements s’opèrent généralement à l’adolescence.

Si les parents n’habitent pas la même ville, la garde partagée est possible lorsque les enfants sont jeunes. Lorsqu’ils intègrent l’école, il faut trancher. Cela peut être complexe, car dans le cas des gardes partagées, la capacité parentale égale des deux parents est reconnue. Ce sont donc des éléments plus secondaires qui départagent les deux milieux. 

Le choix de l’enfant

Le désir de l’enfant peut être considéré dans le choix des modalités de garde selon son âge. Généralement, entre 8 et 11 ans, son avis fait partie des critères de sélection parmi tant d’autres, mais à partir de 12 ans, son désir sera considéré comme un facteur déterminant. Le tribunal devra par contre évaluer le niveau de maturité et de discernement de l’enfant. 

Êtes-vous satisfait.e des modalités de votre garde partagée?