«Qu’à cela ne tienne, je réalise jour après jour qu’en venant vivre dans cette ville, j’ai, pour la première fois de ma vie, fait un choix conscient et j’ai pris le contrôle de mon existence.»

Autrice: Catherine Lussier

Fin juillet 2022. Il s’est écoulé à peu près 8 mois depuis notre déménagement dans le Bas-St-Laurent. Quand je pense aux lourdes décisions que j’ai prises, il y a de ça déjà un an et demi, j’ai l’impression que c’était dans une autre vie. Les peurs que j’ai entretenues tout ce temps se sont évaporées pratiquement au tout début de notre aventure ici. Le vertige ressenti me semble tellement irrationnel aujourd’hui. Les épreuves traversées pour arriver à destination sont loin derrière et toutes les gouttes suées durant cette période me semblent insignifiantes vu le résultat. J’ai cette impression ferme d’avoir pris la meilleure décision pour ma famille, mais surtout pour moi-même.

Finalement, vivre dans une ville autosuffisante, au bord du fleuve et près de la nature, ça me ressemble drôlement! Il est certain que nous avons trouvé ici la maison de nos rêves. Une propriété que l’on n’aurait jamais pu se permettre dans la grande région métropolitaine. Les premières semaines, nous l’avions même surnommée le «chalet de luxe» avec cette cour boisée sans voisins arrière où on y voyait la neige scintiller à perte de vue. En prime, un voisinage plein de petits amis pour nos filles et de parents bienveillants qui nous ont accueillis chaleureusement. Il faut dire aussi que j’ai trouvé ici une job vraiment trippante, le genre de défi dont j’avais besoin à ce stade-ci de ma carrière avec en prime, de super collègues. Un bonus essentiel à la béatitude ressentie par rapport à ce changement de vie.

Vivre dans un endroit au paysage bucolique est comme je l’avais imaginé. Pas une fois je ne passe devant le fleuve sans prendre deux minutes pour l’observer. Avant d’habiter ici, je me sentais toujours en vacances quand j’étais de passage dans la région (bon, je l’étais aussi!), et comble de bonheur, ce sentiment demeure même après 8 mois. Après avoir discuté avec beaucoup de personnes qui habitent en région depuis des années, ce sentiment semble perdurer dans le temps. Peu importe le moment de la semaine ou de l’année, on se sent toujours un peu en vacances ici, en région! Et ça m’enthousiasme de savoir que cette légèreté va toujours demeurer.

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Je ne regrette plus les heures gaspillées en transport les jours de semaine. Pas plus que les kilomètres à parcourir pour aller magasiner un item plus spécifique ou pour manger dans un bon restaurant. Que le seul havre de nature disponible soit un parc payant où tout le monde s’agglutine la fin de semaine… De ces fins de semaine de blitz de travaux sur les ponts qui nous empêchent de profiter des avantages de la grande ville.

Quant à ma famille élargie, elle me manque, assurément. Je regrette la distance. J’espère que mes filles ne vieillissent pas trop vite à leurs yeux. Avec deux vagues de COVID plutôt intenses, j’ai dû me résoudre à annuler deux voyages vers mon ancienne ville et passer plusieurs mois sans voir mes proches. Je pensais vraiment que la pandémie était derrière nous et que nous aurions pu éviter ce genre de barrière à notre arrivée, au moins pour les premiers mois où l’on cherche à s’adapter. Sauf que j’ai passé 5 mois sans voir mes parents et jamais je ne m’étais éloigné d’eux aussi longtemps. Je ne vous cacherai pas que lorsque notre petite famille a attrapé la COVID à moins d’une semaine de Pâques, le moral était plutôt bas.

Heureusement, nous avons la technologie qui me permet sans cesse de voir des photos de mes nièces et de discuter avec mes parents en voyant leurs visages souriants sur des plateformes de vidéoconférences. Bien qu’elles soient rares et espacées, merci à ces fins de semaine avec la famille quand tout le monde est sous le même toit à faire le plein de câlins et à se construire des souvenirs. Je souhaite à l’avenir multiplier ces beaux moments avec eux. Trouver l’équilibre qui permettra d’avoir le meilleur des deux mondes: ma vie ici qui me remplit et des visites là-bas à une fréquence qui me satisfait.

Qu’à cela ne tienne, je réalise jour après jour qu’en venant vivre dans cette ville, j’ai, pour la première fois de ma vie, fait un choix conscient et j’ai pris le contrôle de mon existence. Je n’ai pas choisi un endroit parce que je le connais, parce que j’ai grandi ici. J’ai choisi un mode de vie qui était fait pour moi, sans le savoir.

Souvent, on m’a parlé du courage que j’avais de prendre une telle décision, de faire un tel move. Je comprends d’où ça vient parce que ce n’était pas une décision simple et ce n’était pas un projet facilement réalisable… mais je commence à comprendre le véritable sens du mot courage dans ce contexte. Celui d’avoir pu prendre sa vie par les cornes et essayer d’en faire quelque chose à notre image, plutôt que de la laisser couler parce que c’est la seule que l’on connait ou que l’on pense être possible pour nous. À cela, je vous souhaite à tous ce genre de courage!