J’ai mis sur terre une petite fille curieuse. Le jour où elle s’est mise à parler, elle posait sans cesse cette question qui peut mettre à mal la patience des parents : « Pourquoi? »
Pourquoi le ciel est bleu? Pourquoi neige-t-il en hiver? Pourquoi les chiens jappent-ils? Pourquoi faut-il dormir? Pourquoi le gâteau est meilleur que le brocoli?
Puis un jour, elle s’est aperçue que nos connaissances étaient limitées. On n’avait pas réponse à tout, et si je lui répondais quelque chose de farfelu (ce que je faisais souvent), elle s’en apercevait :
– Pourquoi les jouets disparaissent dans ma chambre ?
– Parce qu’il y a un petit lutin qui vit dans notre maison. La nuit, il déplace tes choses pour t’embêter.
– Arrête de dire des niaiseries maman!
Elle ne nous pose plus autant LA question. Seulement si elle sait que le domaine visé est dans un champ d’expertise que nous maîtrisons. Mais elle essaie maintenant de trouver par elle-même les réponses. Et qui dit recherche de réponses dit également expériences.
Ma fille ne le sait pas, mais elle a un esprit incroyablement structuré. Elle planifie, analyse et classe tout. L’intérieur de sa tête ressemble forcément à ça :
Alors que dans la mienne… bien c’est à peu près comme ça :
Dans sa quête de réponses, elle teste beaucoup de choses. Cette année, c’est à mon tour de poser la fameuse question :
– Pourquoi la bouteille de revitalisant est encore vide?
– Pourquoi mon déodorant et la crème à raser sont dans le bain?
– Pourquoi les roches qu’elle a ramenées du lac sont dans la douche, entourées de papier toilette?
– Pourquoi est-ce qu’il y a de la farine sur la plancher de la cuisine?
Parfois, j’ai le goût de perdre patience, surtout quand je me rends compte que je n’ai plus de poudre à pâte au moment où je brasse ma pâte à biscuit. Ou que le comptoir de la chambre de bain est couvert de taches de colorant rouge et que c’est super difficile à laver. Les bons jours, j’arrive à respirer par le nez et je me dis que ce n’est pas une bêtise, mais une expérience. Une expérience qui lui ouvre l’esprit. Ce n’est pas parce que je détestais mes cours de science qu’il faut réprimer ça chez ma fille. On a seulement instauré quelques petites règles pour que tout se déroule dans l’harmonie :
1. On se ramasse toujours quand on a terminé ;
2. Le colorant alimentaire est interdit, tout comme ce qui est dangereux, irritant ou toxique ;
3. On évite le gaspillage, pas besoin de vider le tube de pâte à dents si une petite quantité suffit ;
4. On demande la permission à papa ou maman avant de se servir.
Une autre chose qui me fascine chez elle : sa méthode de travail qui commence toujours par une liste ou une ébauche. Des papiers griffonnés de calculs, de croquis ou de résultats, il y en a dans tous les recoins de sa chambre. Ensuite, elle s’installe en plaçant tout ce dont elle a besoin devant elle. Rien n’est laissé au hasard. Parfois, je jalouse un peu son esprit aussi structuré, surtout lorsqu’il manque de lait pour finir la pâte à crêpes. Non pas à cause d’une expérience, mais parce que je n’ai pas vérifié avant de commencer. Ou qu’elle me dit du haut de ses 9 ans une chose que je sais pertinemment, sans arriver à la modifier : si j’organisais mieux mon réfrigérateur, je perdrais moins de temps. (Ça a fait un peu mal à mon orgueil).
La science et les arts sont très présents dans sa personnalité. Elle a un cerveau analytique et logique, et elle est très sensible et très créative. Les deux meilleures notes dans ses bulletins ont toujours été en science et en arts. Voilà. Et elle arrive à structurer sa créativité, comme sur cet exemple :
Son défi actuel, c’est d’inventer une super recette de slime. Parce qu’en 2018, le slime est synonyme de réussite sociale dans la cour d’école. Il y a quantité de petits échantillons dans mon réfrigérateur, car la recette n’est pas encore au point. Un jour, ses talents lui permettront peut-être de faire de grandes découvertes, autres que cette glue collante. Qui sait ce que l’avenir lui réserve?