Les résultats d’un sondage pour le compte du Réseau pour un Québec Famille la semaine dernière ont attiré mon attention. Selon cette enquête, un parent sur deux (64 %) n’aurait recours aux mesures de conciliation travail-famille offertes par leur employeur que quelques fois par année ou moins.
Pourtant, 82 % d’entre eux auraient accès à divers types de pratiques et accommodements formels ou informels en milieu de travail.
Bénéfices des mobilisations sociales en faveur d’une conciliation famille-travail accrue, ces congés, horaires flexibles, télétravail ou réduction du temps de travail font partie d’une fourchette de mesures offertes par les entreprises qui se targuent d’être à l’avant-garde des politiques familiales en instaurant des pratiques innovantes.
Ces organisations mettent à la disposition des parents des avantages sociaux qui les rendent concurrentielles dans le recrutement et la rétention d’employé.e.s à valeur ajoutée. Des ressources, humaines de surcroît, constituant le socle sur lequel repose fréquemment la profitabilité d’une entreprise dans l’économie du savoir.
Or, alors que ces conditions de travail font l’envie de plusieurs, peu de parents se prévaudraient dans les faits des congés mis à leur disposition pour concilier leurs obligations et leurs engagements professionnels avec les exigences de leur rôle parental.
Combien de fois ai-je entendu un parent qui relate avoir pris un congé tout en ressentant une énorme pression face à ses collègues ou son employeur? Il ne faudrait pas qu’un enfant malade affecte les livrables. Par contre, un parent qui « récupère » ses heures de travail le soir après le dodo des petits, exténué par l’épopée fièvre-recherche d’une clinique-attente-rendez-vous-pharmacie-antibiotique, ça oui.
Sans compter les pères qui subissent des jugements et des contraintes informelles de leurs employeurs pour éviter de partager équitablement avec leur conjointe le congé parental. « Laisse ça à ta blonde, c’est à elle de s’occuper des enfants. »
Ou un parent qui vit une situation difficile et qui doit faire comme si de rien n’était au travail. « Fais ta job, sois productif.ve et tais-toi. »
Oh oui, l’entreprise offre des mesures, mais la culture organisationnelle s’assure la plupart du temps que celles-ci soient considérées comme des privilèges.
Une des raisons serait-elle que ces pratiques et politiques représenteraient simplement une façade et que la culture de l’organisation ne démontre pas réellement un engagement envers un assouplissement du cadre du travail pour s’adapter aux divers besoins des employé.e.s?
Il faudrait être reconnaissants en tant que parents de bénéficier d’une telle possibilité, mais ne pas en abuser. Les utiliser en totalité selon nos réalités familiales est suspicieux. Quel message cela envoie-t-il? Un manque d’engagement et de solidarité? Envers qui, dites-moi donc? Nos enfants?
Comme le souligne Marie Rhéaume du Réseau pour un Québec Famille, « Leur propension à se débrouiller par d’autres moyens avant de demander des accommodements au travail démontre qu[e les parents] ressentent une forte pression sociale à l’effet que la conciliation famille-travail relève d’une responsabilité strictement individuelle ».
Pourtant, les études stipulent clairement que le surmenage diminue la productivité. Cette responsabilité est celle de tous. Les mesures, c’est bien, mais changer la culture en faveur d’une gestion à visage humain et de la reconnaissance véritable des obligations familiales, c’est mieux.
Un Sommet de la famille se déroulera les 14 et 15 mai prochains à Saint-Hyacinthe. Espérons que les entreprises québécoises porteront une attention particulière aux propositions issues de cet évènement. Elles doivent aussi faire leur part en faveur du mieux-être de leurs employé.e.s et de toutes les familles.