[Marianne et Véronique jasent parfois de stuff de mom sur Facebook. Copié-collé de la procrastination du dimanche après-midi.]
V: Fa’que pourquoi don’ tu as fait ça, toi-qui-m’a-inspirée-à-le-faire-itou?
M: Attends minute, je t’ai inspirée à écrire sur les p’tits? J’ai fait ça moi?
V: Ben. Fille. Tu fais partie, avec Mère indigne, de celles que je lisais pis qui m’ont permis de me dire que j’avais le droit d’écrire, que c’tait pertinent de papoter «de ce que [j’avais pu] dans le ventre» (wink wink).
M: C’est drôle parce que ma première motivation, en 2007, c’était celle de ne pas être gossante pour mon entourage. Je ne voulais pas que ma découverte de la maternité submerge mes relations sociales. Je ne voulais pas devenir gaga alors j’ai utilisé mon blogue comme soupape, pis l’écriture pour me libérer.
V: «Gaga» dans le sens que tu étais une de ces mamans full épanouies de toute la chose maternante?
M: Dans le sens de virer folle et de faire de la maternité ma raison d’être. Ça me faisait peur, changer et me transformer uniquement en maman. C’est fou de constater que je me mettais une certaine pression pour rester cool et détachée.
V: Aliénation. Ne se réduire qu’à «ça». Ne plus tant être soi, ne plus savoir ce que c’est, anéwé, être soi parce que tellement plongée dans cet autre, à chaque seconde. C’est ce constat qui m’a conduit à l’écriture. Un impératif de survie. J’ai fait le pari qu’écrire m’aiderait à renouer avec «moé», qu’objectifier mon expérience m’aiderait à la regarder plus clairement. Me souviens même du moment précis où ça m’a pogné le corps. J’avais Fille sué cuisses, elle avait peut-être six ou sept semaines. Elle me regardait de son regard pas encore habité pis j’ai eu la chienne. Pis j’ai eu honte d’avoir la chienne. Pis je me suis dit que je ne pouvais pas être la seule qui avait la chienne et peur de sa chienne. Alors j’ai écrit.
M: Y’a de quoi de fabuleux dans écrire pour soi, pour se faire du bien et que ça fasse du bien à autant de gens. Je ne m’attendais pas à ça. On a tellement besoin de débriefer la maternité.
V: Et de pouvoir en parler «pour vrai», pas avec l’aura de brillance et d’épanouissance exigée et qu’on s’exige parce que jesaispasqui a statué que ce n’était que du bonheur qui déborde.
M: Je l’emmerde jesaispasqui. C’est-tu un genre d’omerta, pour ne pas faire peur aux filles qui veulent des bébés? À moins que ce soit de la pudeur/modestie toute féminine du même acabit que «une fille, ça pète pas»?
V: Le malaise, toé, quand j’ai compris que mon bonheur y débordait pas pantoute, y régressait, même, par moments. Et je me demandais en ta’ ce que j’avais fait de pas correct.
M: Moi, au contraire, je me disais: je fais toute correct, comment ça se fait que j’ai pas de fun?
V: Drette ça: chercher le fun pendant que tu épluches ton «Mieux vivre» pour la millième fois de la journée.
V: Il y a peut-être aussi du «c’est naturel», l’être-maman, une association entre «je l’ai porté» et «je devrais savoir quoi faire avec» et en éprouver que de la joie. Argument essentialiste de marde.
M: J’y ai cru, j’ai voulu y croire.
V: Moi’ssi, t’sais.
M: Moi j’en ai contre l’instantanéité de la chose, du grand amour infini qui nait supposément dès que tu poses les yeux sur la chair de ta chair. Ça se construit, esti.
V: Ceci dit, j’ai beaucoup de respect et d’admiration pour les «épanouies». Je les envie, en fait. Même si je me suis réconciliée avec la maternité et que j’ai de plus en plus de fun avec mon être-maman.
M: Ça t’a pris combien de temps, l’épanouissement?
V: Beaucoup. Je dirais que ça fait peut-être un an et des poussières que je peux parler d’être très heureuse de ma maternité, de la vivre bien. Avant, je la subissais pas mal. J’avais toujours peur de ne pas en faire assez, de ne pas bien faire les choses, de ne pas offrir assez. L’esti de suffisance. Le fait d’avoir des conversations avec les p’tits, ça change de quoi, dans le lien. L’amour qui se partage, se nomme, aussi.
M: Moi aussi, les conversations ont changé la perception que j’avais sur mon aînée, comme si j’accédais à un autre niveau, un autre terrain. On revient aux mots, dude, les mots.
V: [hochement approbatif de la tête]
M: [doit aller ramasser une flaque de lait et de sirop d’érable]