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A-t-on le droit de dire que c’est facile être mère?
Crédit: slodive

« Elle s’est levée à 9 h 30 ce matin. Nenon, pas de boire cette nuit. » – Ne le dis pas trop fort…
« L’allaitement? Ça va full bien! » – Attends, ça va te rattraper dans le détour…
« Oui, j’ai retrouvé ma ligne. J’ai pas de mérite, c’est comme ça. » – Ben, t’es ben chanceuse! Criss colice de tabarnack.

Des fois, je me dis qu’on aime mieux entendre le contraire. 

Doit-on s’excuser que tout aille bien?

Peut-être que quand ça va mal, que tu es à bout, fatiguée, pleine de vomi, les cheveux sales, le chum qui joue au nintendo, ça te fait un peu chier d’entendre une p’tite maudite insinuer que c’est facile. Mais se peut-il que ce soit vrai, pour elle? 

C’est vrai. C’est facile, enrichissant et plaisant pour moi. Désolée. Je le dis sur le ton du chuchotement. Je suis chanceuse, oui. Ça, c’est la phrase qu’on lance illico, pour se déculpabiliser. Je me souviens qu’enceinte, les scénarios que j’imaginais étaient empreints de nuits blanches, de moi qui pleure en boule dans le coin, qui ne peut plus sentir mon homme et qui appelle mes amies pour les implorer de me faire sortir de la maison. Pourquoi je n’ai pas pensé au scénario plus doux? Il est vrai que les pleurs enterrent les chuchotements.

Comprenez-moi bien. Je compatis avec vos nuits blanches et je ressens votre mal de dos de toujours porter bébé qui braille s’il est pas dans vos bras, mais mon quotidien n’est pas le même. Oui, je suis chanceuse. Vous voyez, je l’ai redit. 

Je n’ai pas de réponse. Je ne veux certes pas vous faire suer avec ça. À vous qui êtes enceintes par contre, je prends un porte-voix : « Oyé! Oyé! Ça se peut un bébé qui se lève à 9 h 15, qui sourit tout le temps, qui te laisse du temps pour te laver les cheveux, qui se laisse trimballer au centre d’achat et qui te laisse la p’tite odeur de brise fraîche sur ta chemise plutôt que vomi no 5. »

Si, à ce stade-ci, vous vous dites encore « pour qui elle se prend elle », j’en rajouterai. Pas une fois je n’ai chialé de me lever la nuit. Chaque fois, je l’ai fait en souriant. Parce que j’avais ce privilège, enfin. Parce qu’un moment donné dans ma vie, j’ai dormi des 8 heures d’affilées avec des larmes qui roulaient sur mes joues parce que plus personne n’avait besoin de moi la nuit. Parce que les moments de trop toute, ils sont beaux quand même. 

À votre tour de chuchoter. Ouep, on est chanceuses.

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