« Maman! » C'est moi, ça. Je mérite ce titre, pis le point d'exclamation qui vient avec lui.

Ça se mérite, un titre comme ça. Ça se mérite, pis ça s'entretient. Je fais des introspections régulières depuis que j'ai des enfants. Parfois ça arrive bien malgré moi.

La plus importante de mes introspections est survenue lors de la lecture du texte de Carolane qui traitait des maladies mentales. Sans m'être dit « CIBOLAILLE, je suis en dépression! », ce billet a fait sonner une cloche dans ma tête. J'ai appelé au CLSC pour demander de rencontrer une travailleuse sociale, juste parce que je suis une maman et que je ne voulais pas prendre de chance : une maladie mentale non-traitée pourrait avoir des répercussions sur la vie de mes enfants.

La personne au bout du fil m'a dit quelque chose qui a changé ma vie.

« Parlez-moi de votre consommation d'alcool. »

Je lui ai répondu que j'aimais bien mon gin. Que, oui, je buvais plus que la moyenne des gens. Mais pas assez pour avoir recours à un programme d'aide. Quoique pour le bien-être de mes trésors, j'accepterais de rencontrer l'intervenante du programme qu'elle me présentait.

« Le programme Alcochoix+ sert à réduire et à vous faire reprendre le contrôle de votre consommation d'alcool. Selon vous, est-ce que vous buvez entre sept et trente-cinq verres standards par semaine? »

« Entre sept et trente-cinq drinks par semaine, c'est moi, ça! » que j'y'ai dit.

Une rencontre avec l'intervenante a été fixée. J'y suis allée avec mes deux enfants.

Cette intervenante (Je n'aime pas l'appeler « intervenante ». Si ça ne vous dérange pas, je vais l'appeler Beyoncé. Parce que, comme Beyoncé, l'intervenante en question est formidable. Pis j'aurai l'air de connaître Beyoncé dans la vraie de vraie vie.) et moi avons rapidement connecté. Je l'ai tout de suite aimée.

Fait que Beyoncé m'a remis un guide comportant six étapes; une par semaine. Avec ce guide, un petit cahier destiné à noter mes consommations. Combien, quel jour, à quelle heure, dans quel contexte pis pourquoi. Je devais, au cours de la première semaine, vivre comme d'habitude, en notant chaque drink. Juste pour dresser mon profil de consommatrice. Dans ma tête, j'allais PEUT-ÊTRE frôler le 35/semaine. PEUT-ÊTRE.

Je n'ai pas vraiment envie de dévoiler mon résultat de la semaine ici. Parce que j'ai peur des jugements. Ceux des inconnus et surtout ceux de mes proches. Disons simplement que je n'étais pas admissible au programme Alcochoix+.

Normalement, Beyoncé aurait dû arrêter de me voir. Arrêter ça là en me disant d'essayer les centres de désintoxication. Mais elle m'a dit « Je pense trop souvent à toi pour te laisser tomber. Je te regarde, puis, je regarde ton total hebdomadaire. Je ne suis pas capable de faire le lien entre ce que je lis et ce que je vois. Je ne te laisserai pas tomber dans les failles du système. »

Son ton semblait m'annoncer qu'un grand combat m'attendait. Et elle avait raison.

Le combat serait grand, oui. Mais pas assez grand pour effrayer ma tête dure. Ma vieille tête dure remplie d'amour pour mes enfants.