C’était un vendredi matin, avant le changement d’heure. Je me suis levée et il faisait sombre. Comme le reste de ma journée d’ailleurs.
 
Ça faisait des jours que je me préparais, mentalement et physiquement. Une p’tite pensée positive par ci, quelques dizaines de comprimés d’hormones et de vitamines par là, et me voici au jour J ou plutôt I : l’insémination.
 
J’arrive à la clinique sans trop savoir où, ou comment, mais forte de la certitude de mes lectures à n’en plus finir. Je suis prête, que je me dis, enfin ça sera mon tour.
 
C’est vrai que, techniquement, l’insémination est une grosse étape. On passe de l’espoir un peu flou d’avoir enfin le bon timing à la certitude que toutes les parties importantes de nos êtres (ou plus platement dit : follicules et spermatozoïdes) sont à la bonne place au bon moment et dans une concentration optimale. Wow (#Not).
 
C’est vendredi, donc, et je m’en vais sagement dans la salle de traitement, seule comme une grande fille, à ma demande, parce que, t’sais, c’est pas très intéressant de me voir en position gynéco pour observer la sonde entrer dans mon utérus.
 
La médecin spécialiste arrive; me lance un « prête à faire un bébé? » trop enjoué à mon goût et m’apprend en un demi-souffle que mon « endomètre est encore trop mince » alors que je n’en ai jamais entendu parler. Elle a été à mes côtés, disons, un gros quatre minutes et demi. Sans même que j’aie le temps de réaliser ce qui venait de se passer, elle me dit de rester couchée pendant cinq minutes avant de m'en aller. Hein? Quoi? Déjà?
 
Le choc. Bien qu’il ait eu la décence d’attendre le départ du médecin pour me sauter dessus, le choc a été vraiment très intense. J’ai pleuré. Mais PLEURÉ. Si vous saviez…
 
Près de deux ans de déceptions qui sortent d’un coup, ça mène du train. C’est comme une grosse boule d’émotions qu’on ne sait plus comment gérer. Je suis là sous les néons d’hôpital, seule, la position gynéco à moitié défaite, et je suis démunie, tellement. Je me sens vide, seule, énormément triste et fâchée, et déçue, et amère. Je n’ai pas reçu l’accompagnement dont j’aurais eu besoin. Je me suis mise à nue, littéralement, pour un résultat plus qu'incertain. Mon futur bébé, lorsqu'il arrivera, aura été conçu dans l'amour, mais d'une façon beaucoup plus médicale que prévu.

Ce n'est pas censé se passer comme ça.
 
Mon lourd bagage d’émotions m’a suivie toute cette journée-là, comme un paquet indésirable dont je ne savais pas trop quoi faire. J’en ai parlé, évidemment, mais c’est difficile à comprendre pour mes proches que ce possible début de vie ait été pour moi un moment si bouleversant.

 

Une petite lueur de rien qui se pointe… Saura-t-elle frayer son chemin à travers ma tristesse?
Crédit : Pixabay

 
Vrai qu’avec le recul, je sais ce moment est porteur d’une lumière discrète qui cherche à s’allumer. L’espoir. Celui qui fait continuer, qui me hante malgré les déceptions qui s’accumulent. L’espoir trompeur qui me déjoue mois après mois. Mais si… Mais si ça fonctionnait cette fois? Mais si c’était la bonne?
 
Avez-vous déjà vécu le choc de la procréation assistée?
Quels ont été vos trucs pour gérer les déceptions qui s’accumulent?