Le texte que vous vous apprêtez à lire, j’ai mis beaucoup de temps à l’écrire. Un an pour être précise. J’ai hésité avant de mettre en mot ce que ma famille et moi avons vécu avec notre enfant différent. Chaque fois où j’ai tenté de m’installer pour vous partager notre histoire, je me retrouvais en larmes devant mon écran. Aujourd’hui, les mots me viennent aisément et je trouve important de parler de ce que nous avons fait pour aider notre famille.
Notre aîné avait 9 ans à l’époque. Un grand préado qui cumule les diagnostics depuis l’âge de 5 ans. TDAH, trouble de l’opposition, trouble d’anxiété généralisée, dyspraxie motrice et syndrome de Gilles de la Tourette sont des termes souvent utilisés dans notre maison.
Il y a un an, notre fils était au plus mal de sa condition. Il était agressif, irrespectueux et souvent violent. Le milieu scolaire n’arrivait plus à le maintenir en classe et nous n’arrivions plus à gérer ses comportements à la maison.
À cette époque, nous vivions des événements stressants : perte d’emploi, maladie, fin d’un congé de maternité et mon retour au travail. Nous devions tenter de maintenir un milieu stable pour nos enfants, mais notre capacité d’adaptation n’a pas tenu le coup. Nous étions au bout du rouleau.
Un jour, après deux admissions aux urgences, trois interventions policières et plusieurs refus de service de notre CLSC, nous avons fait appel à la DPJ et avons demandé le placement volontaire de notre fils.
Notre grand garçon a passé 30 jours dans un foyer de groupe de réadaptation pour une évaluation. Pendant ces 30 jours, nous avons mis notre vie en veille. Nous étions des parents épuisés et une famille en souffrance. Nous devions reprendre notre souffle et prendre soin de nos trois autres enfants qui souffraient énormément eux aussi des comportements de leur frère aîné.
Nous avons ensuite été pris en charge par un intervenant spécialisé en santé mentale qui nous a coachés pendant neuf mois afin de maintenir notre fils à domicile et retrouver un équilibre de vie un tant soit peu normale.
À ce jour, le placement volontaire de notre garçon est, et restera sans doute, la décision la plus difficile que nous avons eue à prendre mon conjoint et moi.
C’était admettre que nous ne savions pas comment être de bons parents pour notre enfant, que nous n’avions pas les outils nécessaires pour assurer sa sécurité, la nôtre et celle de la fratrie. C’était se demander si nous arriverions un jour à avoir une vie de famille normale et équilibrée malgré les problèmes de santé mentale de notre fils. C’était douter de nous comme homme, comme femme, comme parents. C’était avoir peur du jugement des autres et porter le fardeau de la honte d’être peut-être de mauvais parents. C’était souffrir, jour après jour, de l’absence de cet enfant que nous aimons tant.
Toutefois, aujourd’hui je réalise que de placer notre enfant temporairement a été la meilleure décision parentale que nous ayons prise en tant que parents. Aujourd’hui, notre fils est de retour à la maison. Ses troubles de santé mentale sont encore présents, mais nous sommes mieux outillés pour les gérer. Nous avons appris à travailler en équipe afin de mieux l’encadrer et avons revu notre structure organisationnelle afin de mieux répondre à ses besoins.
De son côté, notre garçon a mûri. Il n’est plus tout à fait le même enfant. Il sait qu’il est maître de son comportement et que chaque comportement inacceptable peut avoir des conséquences.
Et maintenant, il sait encore plus qu’il y a un an qu’il est chanceux. Chanceux d’avoir une famille qui l’aime et qui sera toujours là pour lui. Il sait que nous l’aimons, malgré nos limites, et que l’aide que nous avons reçue a été salvatrice pour notre famille.
Dans les prochaines années, nous aurons probablement d’autres grands défis à relever avec lui (et avec nos autres enfants!), mais je suis certaine que les apprentissages faits dans les derniers mois nous permettront de passer au travers et de l’accompagner dans ses différences. It’s gonna be all good.
Avez-vous déjà dû prendre une décision similaire?