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Nous ne savons jamais

Nancy Hénault
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Nous ne savons jamais
Crédit: Catherine Bachand

À la fin du mois de mai, cela a fait cinq ans que ma meilleure amie est décédée. Début trentaine, alors que nous commençons tout juste à savoir et à avoir ce que nous souhaitons, à se construire un nid douillet et une famille, il est rare de penser à la mort. Pourtant, c’est arrivé. Ce décès m’a laissée perplexe par sa rapidité, par son injustice criante.

Nous étions amies depuis le secondaire. Beaucoup d’histoires et de déboires, des peines d’amour noyées dans du mauvais vin, un parcours de vie unique, des moments durs et des bonheurs partagés. Plusieurs villes se dressaient entre nous et nos petites familles respectives nous prenaient de notre temps, mais nous nous téléphonions assez souvent, juste suffisamment pour se tenir au parfum.

Puis un jour est arrivé un courriel, celui annonçant le retour d’un cancer disparu depuis si longtemps déjà. Je me suis figée puis j’ai pleuré. Je la savais forte et bien entourée, ce qui n’empêchait pas que ce combat à venir serait de taille. Plusieurs villes nous séparaient toujours. Nous échangions donc appels et courriels. Des parcelles de nos vies racontées à distance.

Quelque part entre automne et hiver, les nouvelles étaient encourageantes. Tous les espoirs étaient permis et j’étais si heureuse pour elle. Quelque part en mai, tout s’est détérioré et à la fin de ce mois, par un coucher de soleil sous un ciel strié de rose, elle s’est envolée. Ce soir-là, lorsque j’ai bordé mes enfants qui avaient pratiquement le même âge que les siens, j’ai pleuré à chaudes larmes. Une partie de moi pleurait l’amie que j’avais perdu, et l’autre, l’injustice : je pouvais être là, à serrer mes enfants dans mes bras et pas elle.

Cette amie, elle me manquera toujours. Sa légèreté, sa fraîcheur et son rire. Elle était beaucoup de ce que je n’étais pas. Nous ne pensons pas à la mort au cœur de notre jeunesse et j’aurai alors appris que tout peut arriver. Son décès a rendu la vie plus précieuse à mes yeux car je l’ai alors appréciée bien davantage. Je suis devenue reconnaissante malgré une existence que j’avais souvent souhaitée différente. Je comprenais donc le privilège d’être simplement vivante.

Je pense à elle encore si souvent, c’est fou. Je ne peux m’empêcher de trouver sa mort injuste mais surtout si prématurée.  Je n’en trouverai pas le sens, cela reviendrait à enlever le sens même à la vie. Même si je souhaitais lui rendre hommage, je ne le pourrais pas car je n’aurais pas cette prétention ni les mots suffisants pour le faire. Tout ce que je peux dire, c’est que son passage aura été celui d’une étoile filante : il aura été bref, lumineux et inspirant. Je ne l’oublierai jamais… Full Love ma belle amie.

Avez-vous déjà connu une étoile filante?

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