Quand on s’est connus, l’homme et moi, jamais je n’aurais pensé qu’il serait le père de mes enfants. On était jeunes, à peine sortis de l’adolescence, pas tout à fait adultes encore. On s’est trouvés cutes pis on s’est frenchés comme s’il n’y avait pas de lendemain.

On a continué comme ça quelques années, notre couple résistant à quelques chicanes et à deux étés passés à l’étranger de mon côté. On s’aimait d’un amour simple et un peu naïf. Puis, à l’université, tout a éclaté. On s’est laissés. On a fait notre chemin chacun de notre bord et puis, un jour, nos routes se sont finalement recroisées pour de bon.

À partir de là, mon amour pour lui a changé. Je ne reprenais pas là où nous nous étions laissés. Je l’aimais différemment, mieux, dans un sens. Je l’aimais d’une façon plus mature, plus respectueuse et plus adulte. Rapidement, nous avons commencé à construire notre petite vie à nous. Nous avons emménagé ensemble, acheté nos premiers meubles, notre premier condo, fait nos premiers vrais voyages et élaboré nos rêves pour l’avenir.

J’ai découvert des petites choses sur lui qui m’ont fait l’aimer encore plus : son incapacité à jeter ses bas troués, sa fixation sur la façon de placer le sac dans la poubelle, les petits mots qu’il cachait, ici et là, le matin avant de partir pour que je les découvre par surprise au cours de la journée. J’ai découvert qu’il était capable de m’épauler dans les moments les plus difficiles tout comme il était en mesure de se confier à moi.

Honnêtement, à ce stade, je ne pensais pas que deux humains pouvaient s’aimer plus que ça.
Puis je suis tombée enceinte. J’ai alors découvert un homme encore plus doux, plus humain et plus vulnérable. J’aimais sa manière de prendre soin de moi, de passer des heures à discuter de noms de bébé, de s’extasier devant les petits coups dans mon ventre, son excitation au fur et à mesure que les semaines passaient.

Le matin où Benjamin est venu au monde, c’est tout mon monde qui a été chamboulé. J’ai découvert qu’on pouvait ressentir un amour si intense que ça fait mal pour un petit être qui n’a que quelques heures de vie. J’ai aussi réalisé que mon chum avait fait la même découverte. Je voyais dans ses yeux que quelque part, il venait de trouver quelqu’un qu’il aimait encore plus que moi. Et ça, ça m’a fait l’aimer encore plus.

Crédit : Véronique Landry
 

Depuis, deux ans et demi se sont écoulés. Une petite fille est venue se joindre à notre petite famille. Et chaque jour, mon amour pour lui grandit encore. Même si on se chicane plus qu’avant, même si on a moins le temps de se coller, même si on fait moins l’amour, même si nos moments juste nous deux se font plus rares.

Je l’aime tellement quand, la nuit, je me réveille et le surprends à chanter des chansons à notre mini même s’il travaille le lendemain. Mon cœur explose quand je le vois se promener fièrement avec les enfants dans les bras ou lorsque je le  vois rire de trouver un petit régurgit sur sa chemise alors qu’il est dans le cadre de la porte pour aller travailler. Je l’aime tellement quand je le vois retenir ses larmes devant celles de mon deux ans sans cesse malade. Je sais tellement qu’il voudrait prendre toute cette souffrance pour lui.

Crédit : Véronique Landry
 

Et surtout, je l’aime encore plus depuis que je le vois à travers les yeux de mes enfants. Ces petits humains dont les visages s’éclairent dès qu’il rentre dans la pièce, qui le réclament bruyamment à grand coup de « papa!! » et de rires, qui le serrent fort dans leurs petits bras et plantent leurs becs mouillés dans son cou.

Chaque jour, il me fait découvrir un petit quelque chose de nouveau qui décuple mon amour pour lui. Et surtout, je l’aime d’être le père qu’il est et d’aimer la mère que je suis.