Hier, je suis tombée sur cette chronique de Patrick Lagacé au sujet du divorce de Julie Snyder et Pierre-Karl Péladeau et je me suis sentie interpellée. En tant qu’avocate en droit familial (le chat sort du sac!), il y a un gros je-ne-sais-quoi qui m’irrite dans les propos du journaliste.

Irritée pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que les divorces sont rarement très noirs ou très blancs. Le gris est souvent à l’honneur. Oui, certains diront que tout s’est bien passé, que personne n’a eu mal, que le partage des biens s’est fait dans la plus grande des harmonies. Ce sera sans doute vrai, en partie. Le divorce n’est jamais velours. Un couple se brise, une famille éclate, les amitiés partent dans tous les sens. D’un côté, comme de l’autre, il y a une perte au change.

Dans sa chronique, Lagacé écrit qu’il réalise aujourd’hui à quel point le divorce de ses parents a pu l’affecter. C’est malheureux, mais c’est la réalité. Il n’y a pas de cours d’étiquette en matière de séparation. Les émotions entrent par la grande porte et viennent tout teinter. Cela dit, c’est possible de gérer intelligemment une séparation. J’y crois.

« C’est ta job, c’est clair que tu y crois? »
Pas nécessairement. La désillusion est facile au pays du droit de la famille. Et ceux qui vivent de désillusions sont peut-être – et je dis bien « peut-être » avec de gros guillemets – ceux qui peuvent se payer ces somptueux chalets avec vue sur le lac ou mieux, ceux qui peuvent écrire à leur sujet.

Évoquer le lac et le chalet, c’est véhiculer l’idée préconçue que les avocats sont tous pleins à craquer – insérer ici un raclage de gorge bien senti. Peut-être que je prêche pour ma paroisse, mais représenter une partie dans une histoire de séparation, de garde ou de divorce, c’est rarement pour la paie. Plusieurs de mes collègues pourraient le dire, il faut avoir la vocation pour faire ce genre de métier. Il faut croire que nos clients ont des droits et que ces droits valent la peine d’être défendus. Va falloir arrêter de prendre l’émission Ruptures pour du cash. Peu nombreux sont les avocats en droit familial qui ont la capacité de louer des bureaux aussi somptueux et modernes que ceux de la fictive Me Beaumont.

Le plus irritant, par ailleurs, c’est que Lagacé s’inquiète pour les enfants. Julie et Pierre-Karl seraient en train de mettre dans leur panier toutes les conditions favorables pour que leur progéniture ressorte de ce divorce public encore plus anéantie qu’ils ne le sont déjà. Parce que les informations coulent, parce qu’elles s’infirment et se confirment par communiqué de presse. Parce que PKP a retenu les services d’un membre du Barreau dont le taux horaire avoisine les 600 $.

C’est drôle, moi, je m’inquiète pour n’importe quel enfant du divorce. Pour la mère, pour le père aussi. Je me sens de trop, même si je suis payée pour en faire partie. Un divorce ce n’est jamais jojo. Mais, un droit reste un droit et c’est le même droit pour tous.

Dans sa chronique, et même si ce n’est pas l’idée principale, Lagacé donne l’impression que la guerre est pire si les parties sont en moyens, que les enfants ont « plus mal », que la bataille est plus féroce. C’est faux, tellement faux. Oui, c’est impressionnant un avocat excentrique et explosif – ça donne le feeling qu’on va avoir droit à un gros show – pis des fois, c’est juste un show de boucane.

J’espère que ça lui a profité, à Patrick Lagacé, de chroniquer le divorce de Julie Snyder et PKP. Parce que vraiment, s’il souhaitait le bien de leurs enfants, il se serait abstenu. Il n’aurait pas, lui aussi, mis son pied dans la machine médiatique les plaignants de leur triste sort. Il se serait senti de trop, dans le silence. Il aurait évité d’imager son texte à coup d’idées préconçues et il aurait laissé au droit de la famille, et à cette famille en particulier, l’intimité à laquelle elle a droit. 

Un divorce bousille la vie. Oui, c’est vrai. La vie, comme elle devrait être, n’est pas supposée inclure un divorce. Oui, c’est un monde qui s’écroule. Celui de l’homme, de la femme et celui des enfants aussi.