En ce moment, j’ai la chienne. J’ai peur. Je me sens divisée en deux. Littéralement, physiquement, je sens mon corps et ma tête se déchirer.
Je recommence à travailler dans six dodos. Au moment où vous lirez ces lignes, j’aurai déjà remis les pieds dans mon bureau. Fini le congé de maternité. Après deux ans et demi d’arrêt, je serai de retour derrière mon écran d’ordinateur. Je serai assise sur ma chaise droite, contrainte par un horaire de 8 à 5, à faire un travail pour lequel on me donne de l’argent plutôt que de rester à la maison à prendre soin de mes trésors.
Ce serait mentir de ne pas avouer que je suis ambivalente par rapport à tout ce changement qui m’attend. Comme je l’ai déjà dit, j’ai peur et je me sens déchirée parce que j’ai l’impression que je vais avoir beaucoup de mal à laisser mes enfants à la garderie tous les matins pour les retrouver seulement à la fin de la journée. Et d’un autre côté, j’ai presque hâte de découvrir la nouvelle vie qui m’attend et de retrouver de nouveaux défis. Je ne me voyais pas dire adieu à ma job, sans filet de sécurité ou autre projet professionnel. Je ne pouvais pas me résoudre à tout abandonner. J’aurais pu, mais j’imagine que, quelque part, j’avais envie de relever des défis professionnels.
J’aimais le congé de maternité, parce qu’il était transitoire. Parce qu’il était paisible et tranquille, la plupart du temps. Parce que je savais qu’il y avait quelque chose d’autre après ce beau moment d’arrêt à prendre soin de mes bébés.
J’ai peur parce que je ne sais pas à quoi m’attendre, moi qui ne suis jamais retournée sur le marché du travail depuis que je suis une maman. J’ai peur aussi parce que mes filles, la plus jeune comme la plus vieille, n’ont jamais été à la garderie. Elles n’ont jamais été séparées, ou presque, de leur mère pendant plus d’une heure ou deux. J’ai peur parce que je sais que notre univers va bientôt chavirer et que j’aimais notre équilibre fragile. J’ai peur d’être séparée d’elles.
Je sais que ça va sûrement bien aller. Je sais aussi que je peux revenir en arrière, si jamais j’en ressens le besoin. Mais en ce moment, je me sens sur le bord d’une falaise, et j’ai peur tout en étant excitée à l’idée de sauter en bas. Vous connaissez ce feeling?