Véronique Barbe. Décédée. Assassinée. Victime de ce qui a toutes les apparences d’un meurtre conjugal. Ce que les médias qualifient, à tort, de drame familial. Une expression qui rend invisible encore davantage la violence faite aux femmes et qui biaise le traitement de la nouvelle dans les différents médias d’information.
L’annonce de la mort violente de cette femme aura à peine filtré à travers tout le brouhaha des bulletins spéciaux concernant l’enlèvement de son fils. Noyée au travers de tous les reportages concernant monsieur. Étouffée par la chasse à l’homme qui aura gardé tous les citoyens du Québec en haleine.
Comprenons-nous bien. Il était primordial que l’alerte Amber prenne tout l’espace médiatique. La priorité absolue était de retrouver, vivant, le petit garçon de Véronique Barbe, et pouvoir le mettre en sécurité, loin de l’emprise de son père. Ce que, fort heureusement, l’alerte Amber aura permis.
Ce que je dénonce, c’est toute l’attention dont a bénéficié Ugo Fredette. Combien l’assassinat de sa conjointe est devenu presque secondaire dans cette horrible histoire. Comment son passé et son histoire à lui monopolisaient la majorité des reportages diffusés en continu.
Comme si Véronique Barbe, elle, n’était qu’une statistique supplémentaire dans le lourd bilan des homicides conjugaux au Québec. Comme si le meurtre de cette mère de famille n’était qu’un point de départ, presque banal, dans le fil des évènements de cette course contre la montre pour retrouver cet enfant.
Véronique Barbe était une femme, une mère, une amie, une voisine. Elle avait une histoire, un avenir, une vie. Une vie qui lui a été enlevée. Avec une violence inouïe. L’escalade de la violence à son paroxysme, qui laisse quatre enfants privés à jamais de la présence de leur maman.
Cette violence que tous les groupes de lutte pour les droits des femmes dénoncent. Celle qui, collectivement, est banalisée. Celle qu’on soupçonne, mais sans jamais agir. Celle qui rend mal à l’aise. Celle qu’on choisit de ne pas dénoncer. Celle qu’on prend finalement au sérieux seulement une fois l’irréparable commis.
Laissons toute la place aux victimes. À Véronique Barbe. Aux femmes assassinées par leur conjoint. Cessons de faire l’éloge du pauvre homme qui ne digérait pas la séparation. Qui était déboussolé. Impulsif. Cessons de laisser, dans l’imaginaire collectif, l’impression qu’un meurtre peut être passionnel. Tuer n’a rien à voir avec l’amour. Tuer, c’est l’ultime contrôle sur la vie de l’autre. Se donner, dans l’absolu, le droit de vie ou de mort sur l’autre.
Véronique Barbe. De ton nom nous nous souviendrons. De la violence extrême qui aura mené à ton décès également. N’oublions pas, pour qu’un jour, l’histoire cesse de se répéter.