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Vers 6 h du matin (après 15 heures de latence et 17 heures de travail actif), mes contractions étaient toujours aussi espacées, et ma sage-femme me dit : « Estelle, tu es magnifique. Nous avons tout essayé. Mais il semble que ton bébé ait besoin d’un petit coup de pouce pour arriver jusqu’à nous. Le travail doit reprendre un rythme plus rapide. Je te propose que nous appelions le médecin et envisagions un transfert à l’équipe médicale. »
La médecin de garde m’examina. J’y étais presque. 9+. Elle proposa de tenter une manipulation qui ferait glisser la membrane de l’utérus sur la tête du bébé, ce qui pourrait tout démarrer. Ok. J’étais à bout. Je compris mal ce qui se passait, et je hurlai de douleur lorsqu’elle tenta l’affaire. Elle et ma sage-femme me regardèrent pleines d’empathie et aussi d’appréhension : « Ok, on va appeler l’anesthésiste. »
Je me reposai dans les heures qui suivirent, profitant de l’effet de la péridurale (qui fonctionnait par ailleurs à moitié). Ma sage-femme avait proposé de rester avec nous, malgré qu’une foule d’infirmières et de médecins s’affairaient maintenant autour de moi. Nous discutions, d’amour et d’avenir, de rêves et de projets de jardinage. Sa présence était une bénédiction.
Je regardais parfois par la fenêtre. Il s’était mis à neiger. De gros flocons tirés dans tous les sens par le vent. « Une tempête pour ton arrivée. Allez, viens-t’en, mon p’tit bébé. On est prêts, on t’attend. »
Vers 13 h, le (nouveau) médecin dit : « on peut attendre, ou tu peux commencer à pousser. C’est comme tu veux ». J’étais tannée, il fallait que ça se passe. Je me mis à pousser, même si je ne sentais aucune « poussée » venir de mon corps. Ma sage-femme et l’infirmière qui m’accompagnait m’encourageaient telles de vraies cheerleaders : « Go go, tu y arrives, vas-y, championne! »
Je poussai pendant 4 heures. À la fin, plus aucune anesthésie ne m’apaisait, chaque contraction me faisait l’effet d’un terrible choc électrique tout le long de mon côté gauche. Je désespérais.
Ma sage-femme me disait : « Tu y es presque! » et moi j’hurlais : « Je ne te crois plus! » C’est à ce moment qu’elle prit ma main et la mit entre mes jambes. Je sentis la tête de mon bébé, qui était presque toute là. C’était donc vrai! J’y étais presque! Je poussai, je poussai, habitée d’une nouvelle énergie. Ma sage-femme fit signe à mon chum de s’approcher, il ouvrit les bras, attrapa notre fille et la tendit devant lui, lui faisant ce que nous appelons dorénavant « la passe du roi lion ».
Crédit : Giphy
Il la déposa sur moi. J’étais tout sourire, un brin exaltée. Je pleurais ou bien je riais, je ne sais plus. Je m’accrochai au regard de mon chum, pétillant d’émotion. Je l’avais fait. Elle était là.
Le temps s’est suspendu dans l’intensité de la naissance. Peut-être était-il aussi incrédule que nous face à la force de ce passage? Il y est resté accroché quelques jours, faisant vibrer la chaleur, la lumière, la sensation vive de ce grand moment, comme si l’accouchement « continuait », même après notre retour à la maison. Ou peut-être est-ce parce que la musique aux voix d’étoiles continuait de nous accompagner dans ces premiers jours de notre nouvelle vie? En tout cas, cette nouvelle vie nous semblait encore plus vivante qu’avant, ensoleillée qu’elle était maintenant des regards de notre petite Rose.
Rose, née le 5 février 2014, à 16 h 51.