Pour connaître l'histoire de l'accouchement sans bébé de Catherine, consultez la première, deuxième et troisième partie de son témoignage.

Cette épreuve nous a apporté beaucoup de soutien de nos proches. On a la chance d’avoir un entourage formidable qui nous aide à nous en remettre, autant en commémorant la vie de notre enfant décédé qu’en nous changeant les idées lorsque c’est le bon moment. Comme chaque personne ayant vécu un deuil, on a eu droit à des commentaires plus ou moins maladroits de gens bien intentionnés qui ne savaient simplement pas comment nous faire part de leur peine.
 
Parmi eux, une phrase m’a beaucoup marquée. Bien qu’elle se soit glissée innocemment dans la conversation, elle m’a fait sourciller.
 
S’adressant au papa : « Tu as vraiment de la chance que ta job te laisse accompagner ta conjointe pendant cette épreuve à l’hôpital! »
 
Un accouchement, qu’il soit prévu un mois et demi plus tard ou pas, il me semble que c’est une raison suffisante pour appeler le bureau un lundi matin et dire à son boss qu’on n’entrera pas et on ne sait pas quand on sera disponible ensuite. Puis, devinez quoi, moi aussi j’ai soudainement dû aviser mon travail que je ne rentrerais pas au bureau! Et, comme c’était si tôt, rien n’était prêt pour mon départ.
 
Pourquoi, encore aujourd’hui, est-il si facile pour un père d’avoir l’air du héros d’une histoire où la mère est le sujet principal? Ça m’irrite d’entendre des commentaires qui sous-entendent qu’un a de la chance alors que l’autre était dans une obligation. On vivait pourtant la même histoire.
 
D’ailleurs, comment ça se fait qu’en 2018, si on perd un enfant après 20 semaines de grossesse uniquement la mère à droit à un congé selon la RQAP? Je pouvais prendre 18 semaines pour me remettre de ce deuil alors que, selon les règles, mon copain n’avait droit qu’à deux jours… On en a passé quatre à l’hôpital! Heureusement pour mon copain, son travail lui a laissé plus de temps pour qu’il puisse vivre son deuil, lui aussi.
 
Ce n’est pas tous les emplois qui permettent aux hommes d’être flexibles sur ces horaires et vacances dans les mois qui suivent un événement de ce genre. Ça ne fait pas de sens que ce congé de maternité ne puisse pas être divisé. Je ne comprends pas pourquoi il y a encore cette distinction entre le congé de maternité et le congé parental. Pourquoi ne s’agit-il pas seulement de semaines parentales qui peuvent être partagées comme le couple le souhaite?
 
Dans notre cas, j’ai l’impression de pouvoir me permettre de vivre ce deuil alors que mon conjoint doit se refermer et retrouver la vie la plus normale qui soit, rapidement. J’ai la chance d’avoir le temps d’écrire, de me trouver de nouveaux passe-temps, d’aller voir un ostéopathe et une psychologue pour me remettre de cette montagne russe d’émotions et de douleurs. Mon chum, lui, doit ravaler ses sentiments et faire comme si rien ne s’était passé.
 
On dirait que je décris actuellement les fameux stéréotypes des garçons qui n’ont pas « besoin » de montrer leurs émotions, alors que les filles doivent prendre du temps pour ne pas montrer les leurs au travail. C’est terrible!