À l’instar de Grand corps malade dans cet excellent texte (Ma tête, mon cœur et mes couilles), je vis un tiraillement ; ici, c’est entre ma tête, mon cœur et mon corps. Pour ma tête et mon corps, c’est bien clair, il n’y aura pas de troisième bébé. J’ai raconté ici mon deuxième accouchement traumatique. Il est bien certain que je ne veux pas de trois petits orphelins. Mais mon cœur, lui, n’en a que faire de la raison et rêve d’une autre petite boule d’amour toute chaude.

Mon corps est fatigué, courbaturé, ankylosé, exténué, poqué de toutes ces nuits sans sommeil, de ces journées sans sieste et sans répit, de ces heures passées à porter un bébé dans le ventre, contre le ventre, sur le dos, dans les bras. Mon corps rêve d’une nuit sans réveil, d’une nuit ininterrompue et sans bébé en cododo, ce qu’il n’a pas connu depuis si longtemps. Il rêve de se retrouver tout seul, enfin, lui qui allaite sans relâche, depuis bientôt 4 ans, un bébé, puis deux. Il rêve de recommencer à penser à lui, à s’entraîner, à se muscler, à se faire chouchouter. Ou à juste se reposer, dans le silence total.

Ma tête sait bien qu’il est déraisonnable de penser à un autre bébé. Déjà les journées sont difficiles avec deux enfants. Déjà le couple souffre du manque de temps, de la fatigue et de l’éloignement. Quelque chose lui dit que le couple ne survivrait peut-être pas aux bouleversements inhérents à l’arrivée d’un nouveau bébé. Et ma tête craint un autre accouchement avec complications, peut-être même pires cette fois-ci.

Mais mon cœur… lui sait à quel point l’amour est fort! Il rêve de retrouver à nouveau une petite boule de bébé toute douce, de faire connaissance avec une nouvelle âme toute neuve, de sentir l’extrême puissance de l’accouchement, d’accompagner un nouveau petit être dans ce monde. De bercer, de flatter, de consoler, de caresser, d’allaiter et de coller un petit bébé à nouveau. D’assister à toutes ces premières fois, de vivre l’émerveillement et la découverte à chaque petite étape.

C’est normal, docteur? Et quand est-ce que le cœur finit par se rallier aux autres et à accepter que ce soit bel et bien fini?