On m’avait prévenue avant la naissance de mon premier enfant.

Un bébé, c’est un cataclysme dans un couple. Une bombe nucléaire miniature qui explose dans votre lit. Ça aveugle, ça assourdit, ça détruit ce que tu avais si patiemment construit. Fini les moments de complicité. La fatigue et le poids des nouvelles responsabilités qui viennent avec la mini-frimousse s’emploient à creuser un fossé entre l’amoureux et vous.

L’enfant est venu.

J’attendais la catastrophe, le coeur prêt à se réfugier dans un bunker, au besoin.


Crédit : Comfreak/Pixabay

Les jours passaient. Le cataclysme annoncé ne venait pas. Cet enfant-là nous ravissait, nous soudait. On se découvrait en tant que parents et on se sentait plus proches que jamais. On n’a pas vu que la trame de ce qui faisait nous deux se fragilisait par en dessous, sous le poids des nuits blanches, des impondérables et des plans de sortie en amoureux avortés parce que… la vie.

Même que dans un moment d’amour et de folie, on a eu envie de s’agrandir encore. Alors on a fait un autre enfant. Un enfant d’amour.
 


Crédit : Isaac Del Toro/Unsplash

Mais cette fois, l’implosion a bel et bien eu lieu.

Un couple qui s’écroule, ça ne fait pas nécessairement de bruit. Ca ne se brise pas toujours sous les cris et les larmes. Ça se trahit dans ces infimes moments d’indifférence qui s’installent. Des petites choses qui n’auraient l’air de rien si, justement, le diable n’était pas dans les détails.

On peinait, comme n’importe quels nouveaux parents, à garder la maison en ordre. Le salon, la cuisine, la chambre des petits… Trop de tâches ménagères et pas assez de temps de qualité. Un matin, que le « au revoir » était plus tiède que jamais et le baiser trop machinal, j’ai compris.

Je suis allée dans la chambre, notre chambre. J’ai vu le lit défait et négligé, les draps en boule, les vêtements empilés pêle-mêle, les verres vides, le désordre. J’ai eu l’impression de lire un mauvais ouvrage de psycho-pop, de ceux avec un titre du genre : « Vous êtes votre aménagement intérieur ». Et le pire, c’est que c’était vrai. Notre chambre était complètement à l’abandon, comme notre couple. La catastrophe.


Crédit : Annie Spratt/Usplash

Le peu de temps que nous avions à nous consacrer s’était réduit comme une peau de chagrin. De passer d’un couple avec un enfant à une famille de quatre avec une fratrie à gérer et tout le poids des dynamiques était un exercice complexe et demandant. J’avais l’impression d’être tellement impuissante devant les ruines de notre intimité.

J’ai pleuré ce jour-là et les autres qui ont suivi. J’ai changé les draps, ouvert les fenêtres, rangé les vêtements, passé l’aspirateur. N’importe quoi pour nous réveiller de la torpeur, pour ramener l’ordre établi, pour éviter la destruction complète.
Mon coeur cherche son refuge, prêt à extirper ce qui reste de vivant dans les gravats.

Un sourire complice, un éclat de rire, un rêve d’un avenir partagé, qui sait...