C'est l'après-midi, un jour de juillet 2007.  Après avoir constaté qu'il y a de la fumée dehors, j'ouvre la porte de la maison où j'habite avec mes parents, certaine que c'est mon école primaire, au bout de la rue, qui est en feu.  Un policier m'ordonne d'évacuer la maison.  Ma première réaction : Ok, on évacue par précaution, parce qu'une école, c'est gros, on habite juste à côté et il y a du vent.  Ça fait du sens.  Je ramasse mon chat, mon sac à main et toute la famille sort de la maison.  On est tellement certains que l'incendie est sans danger pour nous que mon frère retourne à l'intérieur fermer les fenêtres, histoire que ça ne sente pas trop la fumée à notre retour.  Sauf que ce qu'on ignore, c'est qu'il n'y aura pas de retour.  Parce que le feu n'est pas pris dans l'école, mais bien dans la première d'une série de 8 maisons de ville, incluant la mienne.

La moitié de la ville doit se trouver avec moi dans la cour d'école, quand je réalise que mon cauchemar est devenu réalité.  J'aimerais appeler mon chum au travail, mais qu'est-ce que je pourrais bien lui dire?  Alors, je reste seule à regarder la maison de mon enfance disparaître en fumée.  Le reste de la journée est un vague souvenir.  J'ai tenté de manger un hamburger préparé avec amour par mes beaux-parents pour le souper.  Je ne me souviens de rien d'autre. 

Le lendemain, mon chum et moi allons fouiller dans les décombres, dans l'espoir de trouver quelque chose à sauver.  Mais pendant la nuit, les pompiers ont littéralement bulldozé notre maison pour arrêter une fuite de gaz.  Après avoir fouillé les restes de la maison toute la journée, on aura seulement trouvé une boîte de décorations de Noël et quelques photos en très mauvais état.  Tout le reste a été détruit.  Adieu, la collection de livres de Disney et les jouets que je conservais précieusement pour les transmettre à mes futurs enfants.  Adieu les photos, les souvenirs et surtout, les 5 copies du roman que j'ai écrit.  Il ne me reste que le contenu de mon sac à main et les vêtements que j'ai sur le dos.  Quand on parle de repartir à zéro, je sais maintenant ce que ça veut dire.

Crédit : Mélanie Berthelot

Un sinistre, ça laisse des traces autres que la perte des biens matériels.  Les premières années qui ont suivi l'incendie, je me bouchais les oreilles dès que j'entendais une alarme sonner et j'avais des palpitations en entendant un camion de pompier dans la rue.  Les exercices d'évacuation au travail étaient une vraie torture.  Encore aujourd'hui, plus de 10 ans plus tard, je sursaute violemment quand une toast brûlée fait retentir l'alarme de la maison.  Mais je m'efforce de contrôler mes réactions viscérales, pour éviter que ma fille m'imite et développe une peur des alarmes ou des incendies. 

Heureusement, ce genre d'événement traumatisant a aussi des points positifs, qu'on ne voit que bien plus tard.  Pour moi, l'incendie a marqué un point tournant dans ma relation de couple et en a éventuellement démontré sa solidité.  Cela a aussi changé drastiquement la manière dont je magasine et les objets que je choisis de faire entrer chez moi.  Si cela devait arriver de nouveau, je sais maintenant exactement quoi sortir de ma maison, si j'en ai le temps.  Un sinistre, ça aide à mettre ses priorités à la bonne place.  Tant que ma famille est en sécurité, tout le reste a peu d'importance.  Oui, ça fait mal de perdre des objets qui nous étaient précieux.  Mais la vie continue et au final, ce n'est que du matériel. 

Avez-vous déjà été affecté.e par un sinistre?