J’ai rejoint Facebook en 2008 je crois, parce que ma petite sœur se promenait sur le continent sud-américain et que nous voulions la suivre dans son périple. Je me souviens avoir été hésitante à me brancher sur ce réseau, dont le mandat social me parlait peu à l’époque. Puis, tranquillement, j’ai embarqué, partageant avec joie les photos de mes deux puces et les petites nouvelles de notre quotidien avec la famille éloignée. Ça me donnait l’impression d’être davantage connectée à ce grand cercle, qui lui aussi exposait des bribes de sa vie que je prenais un sincère plaisir à découvrir. À travers ces albums en ligne montés à partir de l’appareil photo numérique (je perds peut-être quelques lectrices ici!) s’inséraient des post d’opinions, de réflexions, des coups de gueule parfois, qui répondaient à cette invitation que la plateforme nous lançait : Exprimez-vous!
 
C’était encore assez gentil ce qu’on y lisait à ce moment-là il me semble. Rien de trop radical, blessant, haineux. Et ça a commencé à déraper; partages de fake news, de théories du complot, de chroniques qui jettent de l’huile sur le feu sans vraiment rien apporter au débat, de prises de parole démagogiques, de gens qui s’engueulent sans s’écouter, qui argumentent juste pour avoir raison, de commentaires faits sous le couvert de l’anonymat, lâches, sournois, irrespectueux, gratuits, agressifs quand ce n’est pas carrément violents. Et plus j’assistais à ce déferlement de contenu douteux, moins j’avais envie d’y prendre part, plus j’avais envie de me taire; pourquoi contribuer au bruit ambiant quand il est déjà assourdissant?
 
Au fil du temps, j’ai vu plusieurs de mes amis.ies battre en retraite eux aussi, se limitant à partager du contenu neutre pour éviter de provoquer trop de remous. Et aujourd’hui, j’en suis rendue à me demander si je me retire carrément dans mes terres. Parce qu’à la question « Qu’est-ce que Facebook m’apporte dans la vie? », la colonne du négatif surpasse celle du positif. Alors à quoi bon?
 
J’ai peut-être un début de réponse : pour rester branchée sur de belles communautés, parce que oui, il en existe encore. Pour voir les binettes des enfants de mes mille cousins-cousines. Pour souhaiter joyeux anniversaire parce que sans Facebook, j’oublie tout le temps. Pour voir les oeuvres d’art de mes amies artistes. Pour lire de vraies nouvelles écrites par des journalistes sérieux. Pour communiquer avec vous, parce que vous me tenez à cœur. Mais est-ce suffisant pour « endurer » tout le reste?
 
Ma plus jeune a eu 13 ans l’été dernier, l’âge supposément règlementaire pour s’ouvrir un compte. Elle ne l’a pas fait, ça ne l’intéresse pas. Quand tu as toute la vie devant toi, tu n’as peut-être pas le goût de réaliser à quel point le monde tourne croche. Bravo ma puce. Peace and love.