À mon retour de congé de maternité de ma première fille, je travaillais à l'autre bout de la ville des heures de fou. Souvent, elle dormait quand je partais et elle dormait quand je revenais! Je la réveillais juste pour la prendre et la bercer, avoir un moment collées. Ma job était passionnante, mais j'ai eu l'impression de manquer des bouts de vie de mon enfant. Je ne regrette pas pantoute l'expérience professionnelle et je ne passais pas mon temps à m'étouffer dans la culpabilité. Mais je me suis promis qu’à un moment donné, le rythme serait différent. Qu’à un moment donné, j'allais me reprendre.

Pis là, je me reprends. Dans la routine métro-boulot-dodo qui peut devenir aliénante, il y a un moment magique dans ma semaine : tous les mercredis, je dîne avec ma grande. Je fais ça depuis qu'elle est rentrée en maternelle. J'ai la chance de travailler pas trop loin de son école cette fois. Et surtout, que ma job ait accepté cet aménagement. Le mercredi, tout le monde sait que je quitte vers 11h15 et que je reviens vers 13h30.

Ça coupe ma semaine en deux - et la sienne aussi. Avec la garde partagée, je n'ai jamais de temps seule avec une ou l'autre de mes filles. Elles sont toujours ensemble, mon attention divisée entre elles. Ce dîner me permet de jaser une heure avec ma grande, ou de faire une activité qu'elle ne peut pas faire quand sa petite soeur est autour. Là on peut sortir la peinture ou éparpiller les billes à collier ou, privilège ultime, jouer sur ma tablette! (Oui oui j'expose mes enfants aux écrans en général et à Netflix en particulier parce qu'elles se lèvent à cinq heures du matin et que je veux dormir, n'appelle pas la DPJ!) Parfois on s'attrape une poutine ou on prend un dessert au café du coin. C'est dans ces moments que j'ai le plus l'impression d'apprendre à la connaître.

Ça passe vite pareil, un dîner d'une cloche à l'autre. J'avoue qu'il nous est arrivé d'étirer le moment et qu'elle est revenue en retard en classe, n'appelle pas la DPJ bis. Pis moi quand je retourne travailler après, j'ai toujours le sourire fendu jusqu'aux oreilles. Quoiqu'il arrive, ce rendez-vous est sacré, et je le dis haut et fort quand on tente de me mettre une réunion dans ce créneau. Et d'habitude, non seulement les gens respectent ça, mais ils tripent.

Là, ma plus jeune dit qu'elle a hâte d'être en maternelle pour qu'on dîne ensemble une fois par semaine...