J'ai toujours voulu des enfants. Très jeune, je suis devenue maman d'une petite fille. J'entrais dans l'âge adulte et j'étais une amoureuse des bébés. Je ne savais pas, toutefois, qu'avec ce nouveau titre venait aussi un puits de culpabilité, dans lequel j'allais m'abreuver un peu trop souvent.

Ce premier bébé est venu établir la normalité du développement d'un enfant pour moi. Elle se développait à vitesse grand V, semblerait-il, puisqu'un jour, la pédiatre a soulevé l'hypothèse d'une douance et voulait la faire évaluer. J'ai dit non. Ma fille n'avait que 2 ans et demi!

Puis, les années passent, ma grande fille s'épanouit différemment. Ses sujets de conversation divergent de ceux des enfants de son âge. Les documentaires remplacent les dessins animés et l'astrophysique est sa passion. Ses inquiétudes sont bien plus profondes que celles des enfants de son âge et lui occasionnent de l'angoisse à l'heure du dodo. « Comment déjouer la mort? »,  « Qu'est-ce qui arrive si on voyage à la vitesse de la lumière? » sont des questions auxquelles je dois répondre régulièrement. Elle a alors 5 ans. J'aurais dû réaliser que ce n'était pas la norme.

Bonne du premier coup dans tout, elle est déjà si exigeante envers elle-même. À l'école, ses relations avec les adultes sont faciles et enrichissantes de part et d'autre. En revanche, celles avec les jeunes de son âge sont décevantes et blessantes. Elle est différente! Et c'est là qu'une angoisse quasi permanente s'est emparée d'elle. Rejetée et intimidée, elle s'est longtemps sentie fautive, inintéressante, insuffisante.

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Elle s'est fait une nouvelle amie; Insomnie. Allongée à côté de cette grande ado qui me confiait ses angoisses et ses peines, j'ai découvert un aspect du rôle de maman jusqu'alors insoupçonné. J'ai eu peur. Elle avait l'âme en peine et tout son petit corps en souffrait. En tant que maman, je m'ennuyais du « becquer bobo » sur un genou écorché. Chaque jour d'école était un calvaire et moi, je la forçais à y aller... parce que c'est ce que je devais faire. Mais la culpabilité me rongeait. J'avais envie de me sauver avec elle sur une île déserte!

On a consulté, maintes fois. L'évaluation est revenue sur le tapis.

J'ai dit oui ! C'était URGENT.

Douance, haut potentiel, angoisse de performance. Des mots puissants, mais libérateurs, qui ont allégé les épaules de ma fille! Elle avait 16 ans. C'est beau, c'est merveilleux, mais c'est difficile à porter. Les personnes douées ont une intelligence différente. Ma fille est pleine de potentiel, de talents et de TOC aussi. Son intelligence va au-delà de ce qu'elle a la maturité émotionnelle d'encaisser.

Son diagnostic lui a apporté des réponses à des questionnements qu'elle avait en silence. Elle s'est crue borderline, narcissique, psychopathe, même. Elle se sent encore différente et en souffre et quand elle souffre, ça me gruge par en dedans.

Si je pouvais remonter le temps, je retournerais lors de ce rendez-vous et, malgré ses 2 ans et demi, je dirais oui parce que plus tôt est le diagnostic, plus facile est le becquer bobo.

Comment avez-vous vécu la douance de votre enfant?