C'est arrivé pour une stupide histoire de sieste. J'avais peur de rater l'heure du dodo, j'envoyais un dossier important à mon boss que je n'arrivais pas à entendre à cause de ma fille de 2 ans et demie qui criait. Elle manquait d’attention. J'ai raccroché et j'ai voulu lui changer sa couche avant de la coucher, mais c'était impossible, elle secouait trop fort ses pieds dans les airs pour m'en dissuader. C'est là que j'ai reçu un bon coup de pied non volontaire dans la mâchoire et ça m'a fait exploser. 

J'ai regardé droit dans les yeux ma fille et j'ai crié :  « MAINTENANT ÇA SUFFIT! TU ARRÊTES TOUT DE SUITE, JE VAIS VRAIMENT ME FÂCHER! ». 

Ce ne sont pas tant les mots choisis, il n'y a eu aucun geste violent, c'est plutôt ma voix et le regard que j'ai posé sur ma fille qui étaient de trop. Ma fille a l'habitude que je sois autoritaire et que je hausse le ton quand elle dépasse les limites. Mais là j'ai perdu le contrôle et j'ai vu dans ses yeux de la tristesse et même un peu de peur, et ça m'a instantanément fait redescendre. La gorge nouée, j'ai pris ma toute petite fille dans mes bras avec douceur. Je lui ai dit calmement « maman a crié et s'excuse. » 

Ma fille, qui semblait pourtant très triste, a à peine pleuré et a voulu très vite jouer à un jeu, comme si elle avait besoin d'oublier le plus rapidement possible ce qui venait de se passer. Puis, contrairement à son habitude, elle s'est endormie en moins de 5 minutes, loin de moi, dans son lit sans histoire.

Quand ses yeux se sont fermés et que sa respiration s'est régulée, deux larmes ont coulé sur mes joues, sans sanglot. T'sais les larmes qu'on n'a pas besoin d'aller chercher avec une grimace. 

Je suis sortie de la chambre et j'ai eu un réflexe classique chez moi : j'ai googlé « J'ai crié sur mon enfant ». 

Les premiers résultats étaient le site de Naître et grandir qui expliquait en long en large et en travers pourquoi il ne fallait surtout pas crier sur son enfant et toutes les graves conséquences que ça avait sur son estime personnelle. Des choses que je savais déjà, moi qui m'intéresse énormément à l'éducation positive. Ce que j'ai lu n'a donc fait qu'aggraver mon sentiment de culpabilité et le sentiment de honte que j'avais. 

J'ai ensuite porté mon attention sur des articles qui expliquaient pourquoi « c'est pas si grave de crier sur son enfant et que c'est souvent mérité ». Des textes sans nuances qui se veulent déculpabilisants, mais qui ont eu un effet inverse sur moi. 

Je n'arrivais pas à trouver l'article qui disait « tu n'aurais pas dû crier, ça n'apporte rien et ta fille ne méritait pas ça. Cela dit, tu n'es pas parfaite et tu as explosé parce que tu es humaine. Arrête d'essayer d'être irréprochable et toujours de bonne humeur. À la place, donne-toi le droit à l'erreur, serre ta fille contre toi, dis-lui que tu es désolée d'avoir crié trop fort. Que parfois maman est en colère, qu'elle a le droit de l'être, mais qu'elle doit aussi savoir dire pardon quand elle a déversé sa colère sur les autres et que ce n'était pas justifié ». Alors je me suis dit que j'allais l'écrire pour moi, cet article, mais aussi pour le parent qui a crié sur son enfant, qui s'en veut et qui a googlé « J'ai crié sur mon enfant ». À ce parent, je lui envoie un câlin (virtuel en temps de COVID-19) même s'il pense ne pas le mériter.