La première année de vie de mon bébé, je l’avais toute planifiée dans ma tête dès la même minute où j’ai vu le petit + apparaître sur mon tout premier test de grossesse (je sais, il faut parfois laisser de la place aux imprévus, je viens de l’apprendre à mes dépens). Nous allions passer d’innombrables moments de qualité, toi et moi, et nous bâtirions des souvenirs à la tonne, car ce bon temps collés ensemble en permanence ne va durer qu’une année ou un peu moins, 50 semaines en fait. Le temps que je cesse d’être rémunérée par le RQAP et que je sois dans l’obligation de retourner travailler afin que tu ne manques de rien.

Eh oui, nous y voilà. Maman retourne au boulot le mois prochain. Étant la maman si organisée que je suis (lire ici trop préventive, stressée par tout, surtout quand il est question de son bébé), je m’étais mise à la recherche d’une place pour toi à la garderie avant même que tu ne franchisses le pas de mon périnée. Après de nombreux appels et de nombreuses visites, j’ai finalement trouvé un endroit où je me suis sentie en confiance. Assez en confiance pour que je pense pouvoir te laisser, toi, le petit humain que j’ai fabriqué à l’intérieur de mes entrailles, dans des bras autres que les miens.

Bien sûr, je ferai tout ça graduellement, pour ne pas briser ton petit cœur (et surtout, pour ne pas briser le mien). Je commencerai par aller passer une heure, peut-être deux, avec toi à la garderie pour que tu te familiarises avec le milieu en ayant confiance, sachant que je suis avec toi. Ensuite, je te laisserai quelques heures seul là-bas. J’augmenterai très doucement ta fréquentation et le jour de mon retour au travail, tu seras prêt. Moi aussi, je te sentirai confiant.

Mais, en un seul instant, mes plans si longuement réfléchis étaient à repenser. La crise de la COVID-19 s’est emparée du monde entier. Le Québec se met sur pause. Mais savez-vous ce qu'il est impossible, pour une maman en congé parental comme moi qui travaille en milieu hospitalier, de mettre sur pause? Le jour J; celui de mon retour au travail. Je n’ai nulle part où envoyer le fruit de mes entrailles pendant mes journées de travail. La garderie que j’ai si soigneusement choisie a dû fermer ses portes, je n’ai pas pu y intégrer doucement mon petit. Pourtant, je dois tout de même y retourner. Qui va payer les factures, sinon? J’agis en bonne citoyenne, je respecte les consignes à la lettre. Je suis confinée à la maison depuis des semaines. J’ai une grand-maman de plus de 70 ans, un neveu asthmatique, une maman diabétique, un papa cardiaque, une grande sœur qui travaille dans un hôpital durement touché par la crise. Je comprends l’importance de toutes ses mesures.

Mais j'ai le coeur brisé de penser que je devrai envoyer ce que j'ai de plus précieux au monde dans un endroit choisi par des inconnus pour devoir, quelques semaines ou mois plus tard, le changer de service de garde, le déraciner de ce qu'il connaît... après avoir déjà vécu une séparation de sa maman qui le gardait près de son coeur depuis son arrivée au monde.

J’ai encore quelques semaines devant moi et je me répète qu’il faut vivre un jour à la fois. Toutefois, un retour au travail peut être un peu angoissant, surtout en pleine pandémie, encore plus quand nous n’avons personne à qui confier la prunelle de nos yeux (ou que nous ne connaissons pas cette personne qui prendra notre enfant en charge). Mais d'ici là, un jour à la fois.

Avez-vous vécu un retour au travail pendant la pandémie?

NDLR: Ce texte a été rédigé avant l'annonce récente du gouvernement sur la réouverture des garderies et des écoles.