Comment, en l’espace de quelques petites années, suis-je passée de « j’ai encore le temps pour avoir des enfants » à « c’est maintenant ou jamais »? Que s’est-il passé pour qu’un tel changement s’opère dans ma réflexion? Combien d’années se sont écoulées? Cinq? Peut-être six? Et me voilà à me sentir à l’hiver de ma maternité, comptant les grains de sable qui s’écoulent dans mon sablier.

Physiologiquement, je peux encore avoir des enfants et c’est peut-être cet état qui m’empêche de faire mon deuil. Parce que cette possibilité crée en moi un espoir. M’ouvre une porte vers une éventuelle autre grossesse. Pourtant, ma famille est complète. J’ai eu deux magnifiques petites filles. Je me sens comblée, heureuse, gâtée même, d’avoir eu cette chance de vivre la maternité quand bon nombre de femmes en sont privées.

Suis-je égoïste d’en vouloir plus? Suis-je une éternelle insatisfaite?

Non, je ne le pense pas.

J’ai juste du mal à faire le deuil de ce qui a été pour moi deux des plus beaux moments de ma vie. Porter mes enfants. Les mettre au monde. Leur donner la vie et magnifier la mienne par la même occasion.

Parce que ces deux petits êtres, ces deux magiciennes malgré elles, ont, en l’espace d’un instant, transformé à jamais mon existence.

En posant les choses à plat, je suis consciente que je ne vivrai plus de grossesse. Mais l’accepter m’est encore impossible. Non. Je n’y arrive pas. Et ça me fait mal de me dire que tout ceci est désormais une partie entière de mon passé.

Comment faire le deuil d’une chose qui nous est encore possible, offerte, accessible, quand la raison prend le dessus? Comment équilibrer la balance entre mon désir de vivre à nouveau une grossesse et la réalité familiale, sociale, physique, financière? Mon âge aussi.

Mais pourquoi ne sommes-nous pas préparées à vivre cette étape pourtant inévitable dans notre vie de mère?

Avancer et se retourner uniquement avec une nostalgie remplie de tendresse. Sans amertume. Sans regret. Sans sentiment d’inachevé.

Ce deuil se fera avec du temps. Beaucoup de temps, peut-être. Mais une chose est certaine, il y aura toujours beaucoup de douceur et de tendresse quand je repenserai à ces 18 mois cumulés de bonheur.