Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais quand on devient parent, il y a une sorte d’épiphénomène qui se crée: tout le monde a un conseil à vous donner. TOUT le monde. Et ces conseils prennent différentes formes. On trouve le conseil direct — « Il faut faire comme ça », le conseil l’air-de-rien —  « Il paraît que c’est mieux de faire ça, enfin, tu fais comme tu veux », le conseil tout-lu-tout-vu — « D’après le professeur machin, dans son livre je parle bébé, chapitre 8 paragraphe 6, il est écrit… ». Il y a aussi le conseil j’ai-pas-d’enfant-mais-je-pense-que (non, en fait, ne pense pas), le conseil à-mon-époque (mais c’était il y a 55 ans, mamie), et j’en passe.

Le problème, c’est que lorsque l’on devient parent pour la première fois, on veut tellement bien faire qu’au début, on les accueille, tous ces conseils. On les prend, jusqu’à la surdose, même. On cherche la vérité, on cherche la solution, parce que c’est pas possible, hein, il y a forcément une raison si bébé pleure, si bébé veut pas dormir, si bébé fait caca jaune (oui, avouons-le, on a toutes un jour tapé sur google « caca jaune bébé »), si… On lit des livres, on passe nos journées sur les groupes de mamans, à la recherche du conseil miracle qui nous changera la vie… Et ce, sous le regard ahuri de notre chum, qui lui, a retenu deux choses — et comme il a raison! — : un bébé, ça pleure et aucun enfant ne se laissera mourir de faim.

Et pourtant, de tous les conseils qu'on m’a donnés, il y en a un que j’ai accueilli précieusement, comme un trésor (celui-là et « Ne t’inquiète pas, aucun enfant n’a été allaité jusqu’à ces dix-huit ans », alors que j’essayais désespérément d’arrêter les tétées nocturnes). Ce n’est même pas un conseil, plutôt une chose que l’on m’a dite, qui m’accompagne chaque jour, et qui m’a sauvée plus d’une fois.

Cette chose, c’est: tout passe. Et c’est tellement vrai.

Tout passe. Le pire… et le meilleur.

Quand ma fille est en crise parce qu’elle a mal aux dents, je me dis que: tout passe.

Quand elle se réveille en pleurs toutes les 1h30, six jours d’affilée, juste quand je viens de reprendre le travail, je me dis que: tout passe.

Quand elle ne veut plus rien manger, plus faire la sieste, et que les éducatrices m’affirment qu’à la garderie, elle dort « très bien » et mange « très bien », je me dis que: tout passe

Quand je m’enferme dans la salle de bain pour pleurer parce que je n’ai pas dormi plus de 4h d’affilée depuis huit mois et que je n’en peux plus, je me répète en boucle que: tout passe.

Tout passe…

Quand ma fille m’accueille le matin avec un grand sourire, n’attendant que de pouvoir se nicher dans mon cou, j’essaie d’oublier que: tout passe.

Quand elle fait coucou pour la première fois et que mon cœur se remplit d’émotion et de fierté, je chasse vite de mon esprit que: tout passe.

Quand elle a le visage et les cheveux recouverts de purée de carottes, que j’ai envie de rire, mais que je dois rester sérieuse, je refuse de penser que: tout passe.

Tout passe. Le pire, et le meilleur. Et je ne veux pas en perdre une miette.