Je m’appelle Emilie, j’ai 31 ans et j’ai peur. Dans ma vie, tout va bien. J’ai un bon travail, deux beaux enfants en santé, une belle maison et un chum que j’aime. J’ai absolument tout pour être heureuse et épanouie. Mais j’ai peur. Peur de ce phénomène dont on entend beaucoup parler dernièrement. Peur de la charge mentale qui pèse sur les mères. Comme si c’était un passage obligé et qu’il m’attendait. J’ai l’impression que je ne pourrai pas y échapper. Je suis enceinte d'un troisième enfant, mais est-ce que ce troisième bébé sera la raison de mon futur breaking point?

Toutes ces mères qui souffrent d’épuisement et qui n’en peuvent plus de cette charge mentale, elles étaient sûrement comme moi autrefois. Des mamans en forme, heureuses et qui n’avaient aucun mal. Tout comme moi, elles vivaient dans le déni de ce qui les attendait. Et un jour, bang. Elles n’en pouvaient plus. J’essaie du mieux que je peux de m’identifier à elles, mais je n’y arrive pas. Non pas parce que je me pense meilleure qu’une autre. Loin de là. Juste parce que je ne me sens pas surchargée. Vous voyez, je manque assez d’ouvrage pour envisager de faire un autre enfant. Donc, ces mères, comme moi, elles ont probablement fait des enfants alors qu’elles étaient en forme. Alors, dites-moi, l’épuisement et la charge mentale trop lourde, ça nous tombe dessus à quel moment?

Est-ce que c’est lorsque les enfants commencent l’école? Parce que moi, contrairement à elles, je ne fais pas une heure de devoir chaque soir en préparant un souper. J’avoue que ça fait peur. Moi, je fais à souper relax en parlant à mon fils des petits amis de la garderie et en mettant un Passe-Partout enregistré à mon plus jeune. Je n’ai pas encore goûté aux peines joies de faire des devoirs le soir après une grosse journée de travail. Après le souper, la vaisselle et les bains, je ne passe pas une heure de plus dans la cuisine à faire des lunchs. Je n’ai même jamais fait de lunch de ma vie, car mes enfants dînent à la garderie.  Alors, je suis dans l’ignorance. Je ne connais pas l’ouvrage qui m’attend au détour.

Chaque fois que ma grossesse se fait remarquer, les gens autour de moi me trouvent donc bien courageuse. Parce que quand une mère veut faire plus de deux enfants, c’est comme si elle changeait de « bracket »: elle tombe dans la catégorie des grosses familles. Elle est une brave, peut-être un peu naïve, qui ne sait pas ce qui l’attend. Elle reçoit toutes sortes de commentaires sur le pourquoi et le comment elle va faire. Parfois, les inquiétudes qu’a son entourage à son endroit sont justifiées. J’ai peur. Est-ce mon cas?

Je lis sur Internet et partout, on parle de ces mères qui en ont plein les bras. Celles qui souffrent de la charge mentale qui est pesante. Ce fardeau qu’elles traînent seules. Alors, dites-moi, est-ce à cause de leur conjoint? Est-ce qu’elles n’ont pas cette chance d’avoir un papa qui s’implique? Est-ce qu’il a toujours été comme cela ou est-ce qu’il a arrêté de s’impliquer peu à peu? Et moi, est-ce que mon chum va cesser de s’impliquer?

Je suis contente que l’on reconnaisse dorénavant le problème que vivent ces mères. Je sais que personne n’est à l’abri de la dépression ou de l’épuisement et c’est justement ça qui me fait peur. J’ai peur de briser mon équilibre. J’ai peur de ne pas pouvoir y échapper. Je m’appelle Emilie, j’ai 31 ans, j’ai deux enfants, un troisième en route et j’ai peur.

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